Depuis l'année 2014, le demi-monde est au pouvoir à Madagascar. L’arrivée de ses membres au pouvoir est caractérisée par le lot commun des parvenus, des arrivistes. Les traits remarquables sont apparus d'eux-mêmes : ils sont traitres, ingrats, nihilistes, incultes, incompétents, frimeurs, vénaux, corrompus, vendus, affairistes, trafiquants, voleurs, despotiques et népotistes. Ce demi-monde a confisqué la révolution de 2009 en promettant monts et merveilles, en accaparant tous les leviers du pouvoir, tant politique qu’économique, en imposant par la force leur intérêts et en ignorant les questions liées aux libertés fondamentales et à la démocratie. Ce demi-monde occupe une place si encombrante et si insolente que le pays risque de chavirer vers un non-sens historique. Sans âme et sans cœur, cette puissance tue avec vacarme ce qui reste de plus précieux à la nation : son avenir.
Le Président de la République élu se drape de son légitimité démocratique et de sa légalité constitutionnelle: «Je suis au pouvoir parce que j'ai été élu au suffrage universel». Pour réel qu'il soit, son argument et sa pensée sont trop courts, voire trop simplistes. Preuve en est qu'il va jusqu'à ignorer le sens et la dignité de l’État dont il est le Chef. L’État est devenu la propriété privée d'un clan qui ne pense qu'à jouir de ses prérogatives étatiques ou se mêlent secrets d'alcôve et pièces d'or de Picsou. Sous Ravalo, l’État était déficient, avec Rajao l’État est défaillant. Les gouvernants ne respectent pas les lois. La population n'a confiance ni aux institutions ni aux politiques. L'absence de majorité réelle et la versatilité vénale des parlementaires ont discrédité fatalement les élus.
L'échec de la réconciliation initiée par la fédération des églises chrétiennes, l'installation des réseaux mafieux au pouvoir, l'implication des forces de l'ordre dans le business, la corruption de la justice, les feuilletons de scandales au sommet de l’État, l'explosion des trafics illicites, les faillites des services publics et surtout les vadrouilles des gouvernements successifs (Kolo Roger, Jean Ravelonarivo et maintenant Olivier Mahafaly) ont fini par plonger le pays dans l'incertitude. Les conséquences immédiates sont désastreuses.
Il y a de moins en moins d'enfants scolarisés, il est de plus en plus difficile de se faire soigner. L'augmentation exponentielle du nombre de prostitués -occasionnelles et/ou juvéniles- fait scandale. L'insécurité rend la vie rurale et urbaine insoutenable, les rapts et les kidnappings font partie du quotidien.
Les dahalo se comportent comme des Indiens du temps des grandes chevauchées de l'Ouest lointain (Far West) américain. La famine continue de sévir et la peste est devenue régulière. Le pays semble vivre au Moyen-âge. Heureusement, les embouteillages monstres en centre ville et les tas d'ordures ménagères au bord des rues rappellent que le XXIème siècle est largement entamé. Malgré son potentiel, Madagascar est, selon le PAM (Programme alimentaire mondial), le 2ème pays le plus touché par la malnutrition au monde et, selon la Banque Mondiale, le 5ème pays le plus pauvre au monde, sans pourtant être en guerre. Avec ce régime au pouvoir, Madagascar et les Malgaches vivent sous une lumière illusoire d'un soleil artificiel.
Les futures élections avec l’impopularité avérée de ce régime, seront une grande farce, source de toutes les contestations prévisibles, possibles et même inimaginables. Les lois électorales floutées et le calendrier électoral sont devenus des devinettes qui risquent d'ébranler les institutions déjà fragiles de cette burlesque comédie républicaine. Le pays n'est plus une République bananière mais pire: Madagascar est devenu une République de Catins. Ce n'est pas seulement la Révolution orange qui a été confisquée par le demi-monde, mais toute la République. C'est comme un de ces cauchemars dont on n'arrive pas à se réveiller. De toute cette carambole de catins, le pays va traverser une année de tous les dangers.
Rakoto Pierre