France: discours répétitif et monotone de Rajaonarimampianina à l’Elysée

Vendredi, 19 Septembre 2014 21:48 Dossier
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Rien de nouveau sous le soleil de l’ère Rajaonarimampianina. Même ses discours sont lassants, à force de répéter les mêmes intentions, comme s’il était toujours un candidat qui allait effectivement apporté de la nouveauté, du peps (qu'il n'aura jamais, malgré ses ridicules haussements d'épaules), un regain de patriotisme dans la continuité de la révolution orange de 2009 qui a mis un terme à la mainmise de l’Etat malgache par Marc Ravalomanana et son groupe Tiko devenu un empire dangereusement tentaculaire, ayant confondu affaires d’Etat et affaire privée et personnelle.

Au Palais de l’Elysée, ce 19 septembre 2014, c’est comme si le président élu, Hery Rajaonarimampianina, avait fait une répétition du discours qu’il va prononcer à la Tribune des Nations Unies, le 25 septembre 2014. Ce ne sera plus du copié-collé mais des redites infernales dont la base sera : Etat de droit-Bonne gouvernance-Justice impartiale. Heu, venez donc à Madagascar constater de visu, après ces huit mois d'ère rajaonarimampienne...

Transcription intégrale des déclarations du Président Hery Rajaonarimampianina

Palais de l’Elysée, vendredi 19 septembre 2014


« Merci beaucoup, Monsieur le Président (Ndlr : François Hollande qui était à ses côtés). Je dois vous remercier d’abord de cette invitation officielle à mon endroit ainsi qu’à ma délégation. C’est une marque d’amitié et d’intérêt particulière à l’endroit du peuple malgache et de Madagascar qui a été un peu absent pendant ces dernières années, à cause de la crise malgache. Cette visite perpétue la longue tradition d’amitié et de coopération qui existe entre nos deux pays. Les liens qui nous unissent sont séculaires, sont historiques comme vous avez dit, tout à l’heure, Monsieur le Président, et Madagascar est un pays ami de la France.

La France a toujours été au côté de Madagascar, même dans les moments difficiles ; elle a apporté son soutien au niveau financier, au niveau politique, au niveau des institutions internationales, et je voudrais marquer, justement aujourd’hui, cette relation que nous avons entre les deux pays. Cette visite, comme toutes les visites officielles, vise aussi le renforcement des relations bilatérales. Nous avons discuté, aujourd’hui, d’économie ; moi j’ai fait part à Monsieur le Président de la république ainsi qu’à la communauté française, notamment la communauté économique, que Madagascar, aujourd’hui, se tourne vers l’avenir, vers la relance économique, vers le développement économique. On a passé une étape importante au niveau politique à travers des élections transparentes, démocratiques. Donc, aujourd’hui, Madagascar est un chantier au niveau économique ; Madagascar est un pays d’opportunité aujourd’hui.

Donc, je suis là pour sensibiliser les autorités françaises et, notamment, la communauté économique pour dire : vous avez un pays ami ; vous avez un pays qui a un potentiel, qui a une volonté de développer ; qui est, aujourd’hui, déterminé et s’engage à mettre en place en l’état de droit, la bonne gouvernance, une justice équitable, lutter contre la corruption. Voilà les idées-moteurs qui sont derrière cette volonté que je représente aujourd’hui. C’est pourquoi c’est vraiment une occasion, Monsieur le Président ; je vous remercie de tout le soutien que vous apportez, que ce soit dans le passé, aujourd’hui et, surtout, dans l’avenir. Et je crois qu’ensemble nous avons beaucoup de chantiers aussi, sur le plan international, à partager. Vous avez parlé tout à l’heure de climat ; Vous avez parlé tout à l’heure d’Ebola. Donc, ce sont des luttes qui nous unissent encore davantage. En tout cas, nous sommes très heureux d’être là et merci encore de cet accueil très chaleureux ».

A gauche: Henry Rabary-Njaka (Directeur de Cabinet, membre "influent" du CA d'Air Madagascar, Secrétaire général du parti Hvm, l'homme qui divague et qui déteste les journalistes malgaches); Rivo Rakotovao (super ministre d'Etat chargé de l'Aménagement du territoire -doublon du ministre des Travaux publics, Roland Ratsiraka- Président du parti Hvm et emprisonneur de journalistes, par orgueil mal placé); Hery Rajaonarimampianina (Président élu, actuellement mal aimé du peuple malgache, qui a fait retirer la plainte de son super ministre contre les deux journalistes emprisonnés trois jours et quatre nuits); Lala Arisoa Razafitrimo Ministre des étranges affaires qui, à son retour, ne dira rien même si les journalistes de mettent à pleurer), Solofo Rasoarahona (l'ami de longue date, ambassadeur itinérant paraît-il) et l'illustre inconnue (donc rôle inconnu aussi), lors du face-à-face avec François Hollande et son équipe. En voyant cette photo, on a comme la sale impression d'entendre le président français dire fermement, en ouvrant son dossier jaune : nous ne discuterons pas des îles éparses. Et la réponse correspondante coule de source: oui, vazaha... De quoi rire jaune, n'est-ce pas ?

Un sourire obséquieux qui en dit long sur les rapports de forces entre la France de François Hollande et Madagascar de Hery Rajaonarimampianina

Complètement novice en la matière, l’expert comptable devenu président est-il au courant qu’en politique il n’y a pas d’amitié, il n’y a que des intérêts ? Est-il au courant que « la France, qui a toujours été au côté de Madagascar, même dans les moments difficiles », l’a colonisé de 1896 à 1960 ? Ce n’est pas aux Malgaches de pardonner ni d’oublier. Seul le Pape Jean-Paul II a eu la formidable humilité de demander pardon pour les exactions commises par l’Eglise catholique, comme l’inquisition. Seuls les Grands Hommes, de passage sur terre, sont capables de cela. A Madagascar, les hommes de pouvoir adorent humilier leurs prochains, les plus faibles…

Hery Rajaonarimampianina est-il au courant qu’en 1947, c’est le parti socialiste, alors au pouvoir, qui a envoyé des troupes pour mater les « sales gaches » ? Est-il au courant, qu’avant le referendum d’autodétermination (terme inventé spécialement pour pays colonisé), en 1960, le général Charles de Gaulle, alors président des Français, a décrété que les îles éparses ne seront jamais restituées à Madagascar ? Que tous les pouvoirs, à partir de lui jusqu’à François Hollande, l’ont respecté, qu’ils aient été de droite ou de gauche ? Car lorsqu’il s’agit de l’intérêt de la France, etc. (vous vous rappelez, sans aucun doute, du discours plagié sur celui de Nicolas Sarkozy). Une vérité infaillible surgit :la diplomatie est l'art consommé d'être hypocrite dans les discours officiels. Lequel des deux aura le Prix Nobel en la matière ?

L'île de Juan de Nova possède, à elle-seule, 67 milliards de mètres cubes de gaz naturel. A qui appartient-elle lorsque l'on sait qu'elle fait partie, en partie, de la ZEE (zone économique exclusive malgache) * ? Qu'un permis d'exploration a été délivré par l'Omnis de Madagascar à la compagnie nigériane SAPETRO, dans la zone de Belo profond ? Où sont passés les 100 millions de dollars liés à un contrat dont l'opinion publique ignore tout, sauf le ministre des Finances de l'époque, actuel président de la république malgache ?

En 1985, Madagascar a  obtenu le statut de Zone économique exclusive (ZEE, s’étendant à 200 miles d’un territoire) créé en 1982 par la convention de Montego Bay, autour de son territoire maritime. Et Juan de Nova est à seulement à 150 km (81 miles marins) des côtes malgaches.

Il est certain que ce schéma n'a jamais traversé l'esprit des actuels dirigeants malgaches

Le peuple malgache ne lui demande pas d’être « agressif » mais, tout de même, au nom de la souveraineté nationale et de tous les morts à cause de cette « France amie », demander fermement la restitution des îles éparses, reconnues malgaches par l’ONU en 1979, ce n’est pas la mer à boire, tout de même ! C’est œuvrer dans ce sens qui constitue les vrais intérêts des Malgaches et non parler d’une « coopération économique » qui ne sera jamais qu’à sens unique pour les seuls intérêts de l’ancien pays colonisateur. La preuve ? Pourquoi n’ont-ils pas déjeuné ensemble, alors qu’il était midi ? Parce qu’un maître et un valet ne partagent pas la même table et surtout pas le même repas.

Entretien et non déjeuner à midi. C'est clair et net: "l'amitié" a ses limites...

En est-il conscient ? François Hollande a l’habitude de déjeuner à 13h. Pourquoi ne pas avoir invité l’ami Hery, vu la proximité du temps ? Preuve qu’il y a des limités dans « l’amitié » au plus haut niveau de ces gens qui dirigent le monde. Mais de toutes les façons, les îles éparses n’auraient pas été au menu… Et en définitif, le soutien de la France de François Hollande était plus moral que financièrement acquis. Qui va réussir à tromper qui dans ce marché de dupes où un bon dirigeant malgache est celui qui la ferme sur des questions qui concernent d'autres Malgaches dans 20 ans, 40 ans, lorsqu'il ne sera plus au pouvoir ? C'est maintenant qu'il faut inverser les rapports de forces. Les vraies richesses appartiennent aux Malgaches et sont à Madagascar. Est-ce difficile pour un expert comptable de trouver le moyen de les utiliser directement pour financer le développement de son pays au lieu d'aller jouer au gentleman mendiant auprès des futures "petites" puissances de l'hémisphère nord, anciens colons de surcroit ? C'était quoi, déjà, la coopération sud-sud ?

Hery Rajaonarimampianina est au pouvoir depuis janvier 2014. Nous sommes au mois de septembre 2014. Nous connaissons, jusqu’ici, tous ses « exploits » dans les domaines de la « mise en place » de l’Etat de droit, de la bonne gouvernance, de la justice équitable, de la lutte contre la corruption. Et cela va continuer avec la mise en place d’une Haute cour de justice très bancale. Cela ne fait pas un pli. Enfin est-il au courant qu’aucun président n’est éternel à son poste ? Ce n’est pas la première crise que la Grande île a traversé et, au train où vont les choses, ce ne sera pas la dernière. Et à l'heure actuelle, sa démocratie c'est celle où l'opposition politique est inexistante. C'est, à présent, tout le peuple qui s'oppose à sa mauvaise gouvernance, à sa dangereuse lenteur à prioriser ce qu'il faut prioriser et à son manque flagrant d'une politique de développement claire, qui doit se traduire en actions et non plus en phraséologie soporifique à la longue. En plus, donc, des fonds, c'est l'imagination et la créativité qui lui manquent le plus. A lui et à son équipe de parvenus qui n'attendent qu'une chose: se remplir les poches des pourcentage de marchés publics dont les tenants et aboutissants ne seront que peu divulgués à l'opinion publique.

New York, le 16 septembre 2014. L'Ougandais Sam Kutesa élu, à l'unanimité, Président de la 69ème Assemblée générale des Nations-Unies (Photo: Ed Betz)

En tout cas, ses déclarations de ce 19 septembre 2014, présagent déjà de ce qu’il va donc débiter à la tribune des Nations Unies, le 25 septembre 2014 : du bis repetita mais, cette fois-ci, devant tous les présidents du monde qui seront bluffés par tant de « prestance », tant de volonté... Certain(e)s vont même se pâmer, du genre : il maîtrise parfaitement la langue française. Attention : tout ce qui brille n’est pas de l’or et il y a un gouffre entre l’ivresse de pouvoir parler devant une si auguste assemblée et les réalités sur le terrain.

L'insécurité urbaine et rurale gagne dangereusement du terrain

Car, pendant ce temps, l’atmosphère socio-économique -et même politique- se détériore à Madagascar. Mais çà, ce n’est pas la tasse de thé de la communauté internationale. Vous l’avez élu ? débrouillez-vous avec ! Les Etats-unis, eux, ont compris qu’il y avait un « truc » pas très catholique, malgré ces « élections démocratiques et transparentes ». Aussi ont-ils décidé d’envoyer un Chargé d’Affaires, au lieu de l’ambassadeur Robert T. Yamate nommé par le président Obama en juillet 2014. Un Chargé d'Affaires pour trois ans.

Pourquoi spécifiquement pour trois ans ? Et cela nous fait revenir à l'analyse de Max Fisher ci-dessus. Ben, qui vivra et survivra verra bien… En tout cas, l’année 2014 n’est pas encore achevée. La CIA, le FBI et la NSA sont au courant.

Mais comme toujours, avec ce genre de dirigeants, aucun communiqué de presse officiel écrit et spontané n’a été transmis aux journalistes malgaches après cette entrevue de haut niveau. Tout le monde attend les ordres (« miandry baiko ») à la présidence de la république de Madagascar. Veloma le siècle de l’information instantanée Adios esprit d’initiative, adieu le professionnalisme dans la communication. Tout le monde se méfie de tout le monde et chacun a peur de sa propre ombre. Cela me ramène à l’annonce de l’assassinat du colonel Richard Ratsimandrava, en 1975. Le monde entier a appris l’horrible nouvelle sur Rfi, quelques heures après. Les Malgaches ne l’ont su que tard dans la journée le lendemain.

Il faut remercier, ici, l’équipe de communication du Palais de l’Elysée pour ce reportage qui, somme toute, n’est qu’un travail de routine de professionnels rompus aux arcanes du traitement de l’information institutionnelle sans verser dans le culte de la personnalité.

Enfin, à propos de changement climatique au niveau planétaire, voici voilà :

Dans quelques jours, une réunion de l’ONU aura lieu en urgence à propos du changement climatique. Nous devrons y remettre la pétition la plus importante d'Avaaz de tous les temps pour demander un monde où 100% de l’énergie serait renouvelable. Le nombre de signataires sera annoncé publiquement à tous les dirigeants du monde pendant le sommet! Signez la pétition sur votre gauche en un clic!


SIGN THE PETITION

 

Un dossier de Jeannot Ramambazafy – 19 septembre 2014

Mis à jour ( Dimanche, 21 Septembre 2014 07:01 )