Discours de M. Pierrot Rajaonarivelo, Ministre des Affaires étrangères,
à l’occasion de la célébration de la Fête nationale française
RĂ©sidence de France, le 14 juillet 2012
Monsieur l’Ambassadeur,
Chère Madame Jean-Christophe BELLIARD,
Excellences, Mesdames et Messieurs,
Permettez-moi, avant toute chose, de vous remercier de l’insigne honneur que vous avez daigné nous accorder en nous associant aujourd’hui, dans cette belle Résidence de France, à la célébration du 223ème anniversaire de la prise de la Bastille par le peuple de Paris, cette impressionnante forteresse ayant, semble-t-il, servi de citadelle militaire et transformée par la suite en prison d’Etat, symbole de l’absolutisme royal.
Dans la foulée de cette inexorable victoire du 14 juillet, les peuples des Nations Unies se souviendront toujours du fait que le document consacrant la Déclaration universelle des droits de l’homme voté par l’Assemblée générale le 10 décembre 1948 découle d’un ensemble de principes que l’assemblée constituante française adopta en 1789, comme fondement des institutions humaines, sous l’appellation de « Déclaration des droits de l’homme et du citoyen ».
Il ne serait peut être pas fastidieux de rappeler brièvement que ces principes ont trait à l’égalité politique et sociale de tous les citoyens, au respect de la propriété, à la souveraineté de la nation, à l’admissibilité de tous les citoyens aux emplois publics, à l’obligation imposée à chaque homme d’obéir à la loi, expression de la volonté générale, au respect des opinions et croyances, à la liberté de la parole et de la presse et à la répartition équitable des impôts consentis librement par les représentants du peuple.
A la lumière des évènements bien connus de tous, que je venais d’évoquer afin qu’ils ne soient pas oubliés et que nous ne soyons pas induits en erreur dans notre lecture des relations du passé, pierre angulaire de l’avenir, je n’aurai garde de laisser échapper cette occasion de rendre hommage aux valeurs immuables héritées de la Révolution française et d’exprimer mes sincères félicitations au Gouvernement et au peuple français ainsi qu’à son Président nouvellement élu, Son Excellence Monsieur François HOLLANDE. Et ce, au nom de Son Excellence Monsieur Andry Nirina RAJOELINA, Président de la transition, au nom du Gouvernement d’union nationale, au nom du peuple malgache et en mon nom personnel.
Monsieur l’Ambassadeur,
En ce jour d’anniversaire qui revêt une solennité toute particulière pour votre pays, pour vos concitoyens mais aussi pour vos amis de toujours, d’ici et d’ailleurs, la pensée d’un illustre écrivain français qui s’est vu décerné le Prix Nobel en 1921, me vient à l’esprit. Anatole France - puisqu’il s’agit de lui- écrivait dans l’une de ses proses abstraites, qui figure parmi le chef d’œuvre littéraire de la France, que « le présent est aride et trouble, l’avenir est caché. Toute la richesse, toute la splendeur, toute la grâce du monde est dans le passé».
Le scepticisme universel, mais pitoyable à la souffrance, de ce grand penseur n’est peut-être pas du goût de tous, et pourtant, cette vision instantanée des choses telles qu’elles caractérisent la tragédie des siècles semble prédire une réalité implacable si nous nous référons à ce qui se passe de nos jours à travers la planète, notamment à cette crise économique qui tend à se propager dans un monde de plus en plus interdépendant et qui menace la stabilité de bon nombre de sociétés politiques, tant dans l’hémisphère nord que dans l’hémisphère sud, tout en aggravant les difficultés des plus vulnérables dans le Tiers-monde.
Vous n’êtes pas sans savoir que Madagascar est en proie à de telles difficultés avec l’apparition en 2009 de l’une des crises politiques les plus préoccupantes qui ont jalonné son histoire postcoloniale.
Pour bon nombre de Malgaches, le présent est devenu aride et trouble.
Depuis trois ans, la nation aspire à un retour à la légalité constitutionnelle qu’il y a lieu effectivement de considérer comme le seul gage de stabilité interne et de reconnaissance de gouvernement de la part de certains Etats tiers qui sont toujours dans l’expectative.
Pour ce faire, il est incontestable qu’il faut passer par l’organisation d’élections libres, transparentes et justes. A ce sujet, je me dois de rappeler que la France a accompagné Madagascar dans la recherche d’une solution appropriée en vue de la résolution de cette crise depuis les premières négociations de Maputo en 2009 jusqu’à la signature, le 17 septembre 2011, de la feuille de route de sortie de crise ayant permis, dans un esprit de consensualité et d’inclusivité, de mettre en place les institutions de la transition, à savoir la Présidence de la transition, le Gouvernement d’union nationale, le Conseil supérieur de la transition (CST), le Congrès de la transition (CT) et la Commission électorale nationale indépendante de la transition (CENIT).
Tout en affirmant son appui à l’application sans réserve de cette feuille de route, nous ne pouvons que nous féliciter du fait que la France a également témoigné de sa volonté d’envisager l’avenir avec détermination. C’est la raison pour laquelle, durant cette période de transition, le Gouvernement français a, sans désemparer, pris l’initiative de conclure avec le Gouvernement malgache un certain nombre de conventions de financement visant à donner une nouvelle impulsion à la coopération franco-malgache.
Il s’agit des Conventions de financement portant plus précisément sur les projets ci-après :
- « Promotion de la recherche et du partenariat dans le secteur du développement rural » ;
- « Mise en place du mécanisme intitulé Fonds social de développement »;
- « Accompagnement de la relance institutionnelle à Madagascar ».
Monsieur l’Ambassadeur,
Les défis auxquels Madagascar et la France, en tant que partenaires inséparables, bien qu’ils ne soient pas de niveaux comparables, vont devoir faire face ensemble, dans la conjoncture difficile actuelle, les conduisent inéluctablement dans la voie du rapprochement et du renforcement des liens d’amitié et de coopération qui les unissent si heureusement. Au demeurant, votre récente nomination à Antananarivo vous donne un avantage irremplaçable, celui de vivre dans l’atmosphère de la Grande Ile et d’y percevoir les impondérables afin d’atteindre, à bon escient, l’objectif prioritaire que votre gouvernement s’est fixé, comme vous me l’avez indiqué lors de notre première entrevue, à savoir le retour à la normale dans ce pays. Je puis vous rassurer que dans la mesure où cet objectif est également le nôtre, les institutions de la transition ne cesseront d’œuvrer pour y parvenir, conformément aux prescriptions de la feuille de route, malgré l’âpreté de l’ouvrage.
Nous nous devons, en tout état de cause, de forger notre armure morale, confiant en la solidarité, que je n’hésiterais pas à qualifier de « militante », dont la République française a constamment fait preuve à l’endroit de la République de Madagascar. Qu’elle veuille bien trouver ici l’expression de nos sentiments respectueux et reconnaissants avec nos vœux de bonheur et de prospérité pour le peuple français.
Je vous remercie de votre aimable attention.