La propagation de fausses nouvelles (âFake newsâ en anglais) fait rage de nos jours et plus particuliĂšrement Ă propos du coronavirus covid-19 qui fait vraiment Ă©crire du n'importe quoi Ă n'importe quel idiot qui a accĂšs Ă Internet. Mais quelle est donc l'origine de ces âFake newsâ et pourquoi les utiliser ? Let's go to learn about that.
En fait, l'expression âFake newsâ est assez rĂ©cente puisqu'elle a Ă©tĂ© popularisĂ©e lors de la campagne prĂ©sidentielle ayant opposĂ© Hillary Clinton Ă Donald Trump, en 2016. Ce, Ă propos de l'usage plus qu'exagĂ©rĂ© de la dĂ©sinformation et de la mĂ©sinformation.
Mais les origines remontent bel et bien Ă la nuit des temps, comme la prostitution, et plus prĂ©cisĂ©ment au VIĂšme siĂšcle avant notre Ăšre, donc avant la naissance de JĂ©sus-Christ, et Ă©manent du gĂ©nĂ©ral et stratĂšge chinois Sun Tzu, de son vrai nom Sun Wu (544-496 AV-J.C.). Dans son ouvrage âL'Art de la guerreâ, Sun Tzu explique lâimportance primordiale de la tromperie et de la duperie dans la conduite dâun conflit. Il insiste, notamment, sur âla nĂ©cessitĂ© de trouver un compromis entre vĂ©ritĂ© et mensonge, afin de rendre les fausses nouvelles les plus crĂ©dibles et efficaces possibles. Dans cette optique, il fallait bien calibrer son objectif et notamment les personnes-ciblesâ, en faisant appel Ă l'interaction entre l'affectivitĂ© et l'intelligence (affect-intellect). Il faut savoir que l'intellect est un terme traduit de l'anglais utilisĂ© dans les Ă©tudes de l'esprit humain et se rĂ©fĂ©rant Ă la capacitĂ© de l'esprit Ă tirer des conclusions correctes sur ce qui est vrai ou faux et sur la façon de rĂ©soudre les problĂšmes. En fait, le but des âFake newsâ Ă la Sun Tzu est d'apporter des Ă©motions au niveau de l'intellect, qui affectent la perception des chose jusqu'Ă les rendre confuses, loin de la rĂ©alitĂ©.
Depuis le premier siĂšcle de notre Ăšre, les auteurs de ce genre âd'informationâ Ă©taient les autoritĂ©s romaines de cette Ă©poque vieille de plus de 2000 ans. Comment ont-elles, pour vous donner un exemple prĂ©cis, justifiĂ© les persĂ©cutions envers les chrĂ©tiens? Voici : parce que ces derniers âse mariaient entre frĂšres et sĆurs et âmangeaientâ le corps du Christâ (eucharistie), ils ont Ă©tĂ© accusĂ©s d'inceste et de cannibalisme. Ainsi, l'autoritĂ© romaine avaient jouĂ© sur les Ă©motions des foules afin de soulever un sentiment dâindignation et de rejet qui lĂ©gitima la condamnation politique, elle-mĂȘme fondĂ©e sur une rĂ©probation morale.
Au Moyen Ăge (PĂ©riode de l'histoire de l'Europe, s'Ă©tendant de la fin du VĂšme siĂšcle Ă la fin du XVĂšme siĂšcle) et jusqu'Ă lâĂ©poque moderne ou temps modernes (1453-1792), les mĂȘmes mĂ©canismes Ă©taient mises Ă lâĆuvre dans des sociĂ©tĂ©s oĂč la rumeur circulait rapidement et oĂč les pouvoirs nâhĂ©sitaient pas Ă instrumentaliser les bruits multiples et infondĂ©s dans un espace public quâils façonnaient en grande partie. En fait, depuis Sun Tzu, le principe est restĂ© immuable : manipuler pour mieux contrĂŽler.
Cependant, durant l'Ă©poque contemporaine qui suivit -couvrant environ les 80 annĂ©es qui prĂ©cĂšdent l'annĂ©e en cours, ou encore la pĂ©riode de 1945 Ă nos jours-, la mutation qualitative et quantitative de la diffusion de lâinformation modifia la rĂ©partition des forces en prĂ©sence. Ainsi, dĂšs la rĂ©volution française, et la multiplication de publications relayant des opinions politiques affirmĂ©es mais toutes aussi diverses sinon divergentes et versatiles, le phĂ©nomĂšne prend une nouvelle ampleur. Le cas de Camille Desmoulins est... exemplaire. Dans une France en pleine guerre civile, suite aux Ă©vĂšnements rĂ©volutionnaires, le journaliste, pourtant connu pour ĂȘtre dĂ©fenseur de la libertĂ© de la presse et homme de lettres, avait assumĂ© la manipulation de lâinformation Ă des fins propagandistes. Mais il a fini par ĂȘtre guillotinĂ© le 5 avril 1794 au cĂŽtĂ© de Danton, pourtant une figure majeure de la RĂ©volution française...
A peu prĂšs Ă la mĂȘme pĂ©riode, mais en Angleterre, les âParagraph Menâ rĂ©digeaient de courts pamphlets quotidiens ou hebdomadaires, tirĂ©s des rumeurs entendues ici ou lĂ , dans la rue ou les bars et autres bistrots. Le but Ă©tait trĂšs simple : dĂ©crĂ©dibiliser un personnage public â britannique ou Ă©tranger â pour le dĂ©stabiliser ou miner sa rĂ©putation dans lâopinion publique. Une fois la rumeur partagĂ©e par le plus grand nombre, elle devenait information et ainsi donc gagnait en crĂ©dibilitĂ©. Avec le dĂ©veloppement exponentiel de la presse, le phĂ©nomĂšne a pris de lâampleur, notamment dans les pĂ©riodes incertaines dâinterrĂšgne ou de crises en tous genres.
Ă partir des annĂ©es 1880, et durant la soixantaine dâannĂ©es oĂč lâantisĂ©mitisme contemporain sâancra inlassablement en Europe, les fausses nouvelles visant les juifs gonflĂšrent et sâamplifiĂšrent, depuis le Protocole des Sages de Sion -un faux plan de conquĂȘte du monde par les juifs et les francs-maçons-, jusquâaux dĂ©bats sur lâentrĂ©e sur le territoire canadien de dizaines de milliers de rĂ©fugiĂ©s juifs europĂ©ens en 1943-1944.
La PremiĂšre Guerre mondiale de 1914 Ă 1918, a Ă©tĂ© âun moment aigu dâinflation des fausses nouvellesâ. En France, on les appelait les âbobardsâ et Ă©taient diffusĂ©es par les puissances belligĂ©rantes bien Ă©videmment, mais Ă©galement par les soldats entre eux. Entre-temps, âLe Canard enchaĂźnĂ©â, fondĂ© par le journaliste Maurice MarĂ©chal et le dessinateur Henri-Paul Gassier, vit le jour le 15 septembre 1915. Mais aprĂšs le 5Ăšme numĂ©ro, il cessa de paraĂźtre pour rĂ©apparaĂźtre pour de bon le 5 juillet 1916 et jusqu'Ă nos jours. Premier journal satirique français, âLe Canard enchaĂźnĂ©â, paraissant tous les mercredis, avait, dĂšs sa naissance, âpris lâengagement dâhonneur de ne cĂ©der, en aucun cas, Ă la dĂ©plorable manie du jour : câest assez dire quâil sâengage Ă ne publier, sous aucun prĂ©texte, un article stratĂ©gique, diplomatique ou Ă©conomique, quel quâil soit â. Exception confirmant toute rĂšgle, âLe Canard enchaĂźnĂ©â n'a fait et ne fera donc jamais dans les âFake newsâ. De nos jours, son fils spirituel est âMĂ©diapartâ (le vrai et non les blogs) d'HervĂ© Edwy Plenel. Revenons Ă nos moutons.
Dans la continuitĂ© de tous ces cas plus ou moins lointains dans le passĂ©, il nâĂ©tait donc pas surprenant de voir Ă©merger rĂ©cemment nombre de fausses nouvelles dans un dĂ©bat politique qui sâest indubitablement radicalisĂ© depuis une vingtaine dâannĂ©es en Europe et en AmĂ©rique du Nord. En effet, lâaffaire du âComet Ping Pongâ, ce restaurant de Washington accusĂ© dâĂȘtre le cĆur dâun trafic dâenfants menĂ© par Hillary Clinton et son directeur de campagne, nâest ni plus ni moins la rĂ©activation de l'affaire Markovic (affaire criminelle impliquant le couple Pompidou -et notamment les mĆurs prĂ©tendument libertines de lâĂ©pouse de lâancien Premier ministre- en 1968) ou plus loin encore celle de Simon de Trente, au XVĂšme siĂšcle, qui voit une quinzaine de juifs de la ville exĂ©cutĂ©s pour avoir prĂ©tendument sacrifiĂ© un jeune enfant de deux ans.
Dans ce cadre des fausses informations, le travail des historiens est fondamental. En effet, face aux emportements mĂ©diatiques, souvent alimentĂ©s par la facilitĂ© d'hommes politiques Ă voir dans leur Ă©poque et leurs actions publiques les germes dâune innovation sans prĂ©cĂ©dent, la recherche et la vulgarisation historiques permettent une mise en perspective souvent trĂšs salutaire. Ce travail doit pourtant ĂȘtre quotidien et sâarticuler avec un travail pĂ©dagogique de la part d'Ă©tudiants. Et les rĂ©sultats seront Ă©galement durables s'ils s'appuient sur le dĂ©cryptage des processus plus ou moins anciens de contrĂŽle et de manipulation de lâinformation.
Dans cette optique, et au mĂȘme titre que le travail du journaliste, la mĂ©thode historique doit interroger les faits en sâappuyant sur des sources, si possible, multiples et variĂ©es. Cette confrontation des sources, ainsi que leur examen, permet de mettre en lumiĂšre les techniques circulatoires de domination et de façonnage de lâopinion publique.
Ainsi, pour prendre les cas d'Emmanuel Macron ou de Donald Trump, âleur exploitation des fausses nouvelles [lors de leurs campagnes Ă©lectorales] sâinscrit surtout dans une dynamique politique visant Ă occuper un terrain mĂ©diatique et Ă investir lâespace public. En rĂ©activant la notion dĂ©jĂ ancienne de âfake newsâ, le futur prĂ©sident amĂ©ricain trouve lĂ une arme politique de choix, jouant sur les Ă©motions, support bien plus propice sur les rĂ©seaux sociaux quâune analyse politiqueâ.
Il s'agit, ici, d'une recette simple, fondement dâune nouvelle Ăšre mĂ©diatico-politique, celle de la post-vĂ©ritĂ© qui est un message court, Ă©lĂ©mentaire, direct, sâadressant plus Ă lâaffect quâĂ lâintellect. Et bonjour les rĂ©seaux sociaux, plus prĂ©cisĂ©ment Facebook oĂč le premier venu a les possibilitĂ©s de dĂ©poser n'importe quelle âFake newsâ, dans le but Ă©vident de nuire Ă autrui. Mais, contrairement au passĂ© pas si lointain oĂč il n'Ă©tait pas possible de vĂ©rifier et dĂ©mentir en temps rĂ©el (avec photos et mĂȘme vidĂ©os Ă l'appui), actuellement, les auteurs de ces informations fausses et mensongĂšres, font, actuellement, face Ă une lĂ©gislation qui va aller en se durcissant. Qu'ils ne croient pas une seconde qu'ils ne se feront jamais attraper ni prendre. Pour l'heure, de nos jours, qu'est-ce que l'on ne raconte pas Ă propos du coronavirus covid-19. Vraiment ! Et de la part de journalistes censĂ©s ĂȘtre chevronnĂ©s mais qui jouent le jeu de certains politiciens d'ici et d'ailleurs...
Concernant Madagascar, prĂ©cisĂ©ment, le cas de la page âGazety Ny Marinaâ, sur Facebook, doit servir de leçon aux apprentis semeurs de merde (littĂ©ralement) au service de politocards qui usent sur eux -dĂ©jĂ amplis de haine viscĂ©rale pour leurs cibles- d'arguments financiers afin d'user et abuser de âce compromis entre vĂ©ritĂ© et mensonge, afin de rendre les fausses nouvelles les plus crĂ©dibles et efficaces possiblesâ. Ainsi, durant une quinzaine de jours, du 10 fĂ©vrier au 26 mars 2020 (la page n'existe plus depuis cette date-lĂ ), ceux qui se prĂ©tendent ĂȘtre des âjournalistes ayant fait des Ă©tudesâ (âgazety nosoratan'ireo mpanao gazety nianatraâ), ont fait paraĂźtre une fausse âUneâ truffĂ©e d'insultes et de gros mots et, surtout de âFake newsâ sur les dirigeants malagasy actuels. Mais sur moi aussi, personnellement. Cette parution Ă©tait dĂ©jĂ une insulte au mĂ©tier de journaliste. Qui sont-ils? Attendons d'abord que ce coronavirus covid-19 de malheur disparaisse. Aussi, avis aux amateurs de âFake newsâ. Quant aux âmpanao gazety niatraâ, ils ne perdent rien pour attendre. Comme je le dis et l'Ă©cris souvent : tout ce saura tĂŽt ou tard. En tout cas, Ă l'instar de Fleury Rakotomalala, le crĂ©ateur en France de l'entitĂ© âMonde et Justiceâ dont la SecrĂ©taire gĂ©nĂ©rale est Ihanta Randriamandrato, ils agissent comme des prostituĂ©(e)s qui existent depuis la nuit des temps. Comme les âFake newsâ. Et la boucle est bouclĂ©e.
Jeannot Ramambazafy - Egalement publié dans "La Gazette de la Grande ßle" du 08.04.2020
Sources : StĂ©phane Lebras, maĂźtre de confĂ©rences en Histoire contemporaine Ă l'UniversitĂ© Clermont Auvergne (CHEC, EA 1001), WikipĂ©dia et âThe true story of fake newsâ