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Rano sy Vary : Mamy Rakoto comme un poisson dans l'eau

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Je ne dirais pas que c'est l'album de la rentrée mais plutôt celui de ma rentrée. En effet, après une pause dans le cadre de mon mois de congé d'été -comme tout travailleur méritant-, je refais surface en vous (re)présentant, façon madagate.com, vision un album malgache à 100% bien que sorti en France en juin 2007.

Comme l'eau et le riz inséparable ("Rano sy Vary", titre de cet album CD), Benjamin Andrian alias Mamy Rakoto nage, ici, comme un poisson dans l'eau à son propre compte mais très très bien entouré... Regards profonds sur un artiste et une œuvre qui rehaussent la valeur de la Culture musicale dite "du terroir" très riche et variée de Madagascar.

MAMY RAKOTO

En fait, si pour les uns son nom est très banal (Rakoto est l'équivalent de Dupont en France) ou inconnu pour les autres, Benjamin Andrian, de son vrai nom Andrianjakamamy Rakotoarinia Benjamin, qui a pris le nom de scène de Mamy Rakoto (qu’on retient plus facilement, n’est-ce pas ?), n'est pas un débutant dans le monde de la musique. En effet, il officiait déjà en tant que bassiste vocaliste dans le renommé groupe malgache Tarika Njila -qui a marqué les débuts de Poopy- dans les années... 1980 ! Au début des années 1990, Mamy Rakoto s'envole pour la France où il réside de nos jours. Dès son arrivée, il est sollicité par Justin Vali, le magicien de la valiha qui vient d'être honoré par la Sacem et qui va se présenter aux élections législatives malgaches le 23 septembre prochain- qui l'engage pour devenir son bassiste attitré. Ce rôle privilégié au sein de ce groupe bien classé dans la catégorie "World Music" va permettre à ce Rakoto sucré (Mamy signifiant cela) de parcourir la planète pour jouer sur les plus grandes scènes internationales.

DANIEL MIKIDACHE

En 1995, avec les passages massifs de grands artistes malgaches en France, arrivant souvent sans leurs musiciens et leurs instruments, Mamy met sur pied un groupe de musiciens résidents locaux qui va accompagner ces artistes lors de leurs tournées dans l'Hexagone. De fil en aiguille, et pour éviter d'être taxé de mercenaire, il va fonder son propre groupe en l'an 2000. Bonjour Gasymusic. Contrairement à se qui se passe à Madagascar où des illustres inconnu(e)s sortent publiquement des "morceaux" affligeants -aussi bien du point de vue du texte que celui de la musique- et "réalisent" des clips avant même d'avoir un cursus et un background, Gasymusic attendra sept ans avant de sortir son premier album. Entre-temps, en 2003, Daniel Mikidache, chanteur issu de Mayotte -ayant ouï le savoir-faire musical de Mamy-, l'engage dans sa formation qui porte son nom. Cette collaboration sera ponctuée par l'enregistrement d'un album et plusieurs tournées mondiales. Mais le groupe Gasymusic en propre apparaît pour la première fois en public, lors de la Foire de Paris en 2004.

Dans le domaine de la musique professionnelle authentique, il ne suffit pas de connaître trois notes et de pondre un texte litanique pour prétendre devenir une star et faire un carton. Dans ce volet de la culture, il n'y a pas de place au hasard. Tout est basé sur le travail, encore le travail, toujours le travail. Ainsi, l'album "Rano sy Vary", sorti en juin 2007, a nécessité un an de travaux en studio où Mamy et ceux qui ont participé sont entrés en juin... 2006. Peu de temps après que Mamy ait fêté ses 41 ans. En effet, il est né le 12 mai 1965, à Moramanga, une ville située à quelque 80 km à l'Est d'Antananarivo. En tout cas, de par un (long) séjour en studio, et avec le concours de musiciens et artistes professionnels, l'album "Rano sy Vary" illustre une osmose impeccable entre le traditionnel, qui conserve l'identité culturelle bien malgache, et la maîtrise de la "High Tech", qui prouve que le label Gasymusic est en mesure de se hisser aux premiers rangs de la World Music, prise dans son vrai sens. En effet, certains pensent que ce terme, assez vague il est vrai, ne s'applique qu'à un folklore local sans grande ambition. Et bien non ! La question n'est plus qu'on aime ou qu’on n'aime pas. Il s'agit d'une anthologie à structure de base typiquement malagasy à laisser en héritage à la postérité et au genre humain, dans le contexte de la mondialisation qui sous-entend la robotisation et l'unicificité négative de la planète Terre. Voici d'ailleurs le nom de toutes celles et tous ceux qui ont participé à "Rano sy Vary".

Mamy Rakoto (Lead vocal, guitare basse, guitare acoustique, sodina, kabôsy); Eric Jean Roy Sambatra (Kabôsy, vocal); Paulo Rasamoelijaonina (Synthétiseur, piano électrique); Tsiry Raharolahy, Patrick Rakotoarivony et Fabrice Thomson (Batterie acoustique); Hector Gomez (Percussions), Javier Estrella (Cajone) -ces trois derniers étant de maîtres du rythme latino-américain-; N'Jaina Ranaivoson (Bass vocal, guitare acoustique); Stéphane de Trébons (Fender Rhodes, piano électrique). Mais on y entend avec plaisir les splendides voix féminines et le savoir-faire des musiciens suivants : Soafara R., Anne-Marie Sahondra alias Sha Rakotofiringa (fille de Jeanne et Naly Rakotofiringa), Mbolatiana (devenue Madame Cucherosset), ayant débuté dans le groupe Maxi au côté de Christophe Ramambazafy et Tovo 'J'Hay, et interprète de l'hymne des Jeux de la Francophonie 1997 à Antananarivo (Vocals) ; Daniel Mikidache qui chante aussi en malgache (Vocal, guitare électro-accoustique); Rakotonanahary Yvon Félix Mamisolofo, pilier du groupe Senge -Prix découvertes Rfi 1999- et leader du groupe Ketsa, spécialiste de l’a capella (Vocal, percussions). Ils font partie des derniers remparts de l'identité culturelle malgache traditionnelle en danger d'extinction.

L'album "Rano sy Vary" comporte onze titres qui sont : "Rano sy Vary" (L'eau et le riz), "Renin-jaza" (littéralement mère d'enfant mais aussi accoucheuse traditionnelle), "Arotsahy" (Votez, participez à une quête), "Santa-bary" (Première récolte du riz), "Dago" (Madagascar en argot), "Mbola hihetsika" (Nous nous mobiliserons encore), "Gasy tsara" (La beauté des Malgaches), "Razandry" (Petit frère), "Tanety" (Colline), "Rano sy Vary" en a capella, "Manadala" (littéralement qui rend fou, par extension qui enivre, enregistré en live). Il s'agit de traductions personnelles mais sur la pochette du CD, un résumé et une traduction en français ont été effectués par Brigitte Rasoloniaina, éminent professeur à l'Inalco (Institut national des langues et civilisations orientales, établissement universitaire sis rue de Lille à Paris. Pour elle : "Cet album est comme une invite à partager les richesses de la pensée malgache...". Mamy Rakoto est le seul auteur compositeur et arrangeur de ces morceaux, mis à part "Arotsahy", en collaboration avec Richard Rakotoarisoa, "Gasy tsara" avec Paulo Rasamoelijaonina, également co-arrangeur ici, tout comme Eric Jean Roy Sambatra dans "Razandry".

SPECTATEURS EBAHIS

Mais tout ce beau monde et tous ces morceaux authentiquement malgaches -avec tout de même un zest jazzy et latino- n'auraient pu être immortalisés sans le concours technique de professionnels du son et du mixage. Donc, je ne suis pas trop d’accord pour le commentaire « Voyage à Madagascar à 100% » lu quelque part. Il faut être honnête(s), même si latino et malgacho, c’est, à peu près, le même tempo… Les artisans de ces enregistrements sont : Mamy Rakoto, direction artistique, Stéphane de Trébons, ingénieur du son qui se sont enfermés au J.P. Studio, 75018 Paris où ont été effectués les prises de sons, les mixages et autres masterings. Le beau graphisme de la jacquette est une œuvre d'Alain Clavier et les exemplaires de "Rano sy Vary" ont été tirés par CD Press Direct. En France, trois concerts de promotion ont eu lieu respectivement : le 23 juin à l'Espace Firat Dügun à Saint Germain Les Corbeils, le 30 juin au Cloître Dewailly à Amiens, les 13 et 14 juillet à La Passerelle dans le 14è arrondissement de Paris. Tous les spectateurs, aussi bien Malagasy que Vazaha ont été unanimes : "Cette musique inspirée des traditions des hautes terres et des côtes de Madagascar est très romantique et mélodieuse mais également bien rythmée. Ce qui reflète parfaitement la riche diversité de la culture malgache. L’ensemble est soutenu par des instruments modernes pour donner un cocktail étonnamment coloré et festif. La polyphonie vocale ne fait que renforcer l'ensemble". Voilà ! Mamy Rakoto ne nage pas en eaux troubles mais évolue comme un poisson dans l'eau avec une équipe qui se complète indissociablement comme... l'eau et le riz. En fait, la majorité des Malgaches ayant participé dans cet album collaborent avec Mikidache. Une équipe solide et solidaire donc. Quand ce bijou sera-t-il disponible à Madagascar où nul n'est prophète en son pays et où le piratage fait des ravages très graves ? Je répondrais : quand les borgnes n'y seront plus rois ! Blague à part, il faudrait que les autorités malgaches sévissent spectaculairement comme dans le cas de kidnappings aux Etats-Unis. Attraper quelques revendeurs de CD pirates c'est bien mais faire de ce vol authentique un crime d'Etat ce serait mieux et plus efficace. Cependant, tout est question de volonté... politique. Wait and see.

Enfin, comme l'information c'est aussi la facilitation des contacts, je vous donne les coordonnées bien ordonnées de Mamy Rakoto :

Benjamin Andrian

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www.gasymusic.net

Jeannot Ramambazafy

Journaliste
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