Juan Somavia, Directeur général du Bureau international du travail
«Zéro nouvelle infection au VIH. Zéro discrimination. Zéro décès dû au sida». L’OIT joint ses efforts à ceux des membres de la famille onusienne et de tous ceux qui luttent pour que ce mot d’ordre devienne une réalité.
Stigmatisation et discrimination, préjugés et peur sont généralement le lot quotidien de ceux qui vivent avec le VIH. Ils font planer une menace permanente sur les lieux de travail. Le sida a souvent un impact dévastateur sur le monde du travail.
La majorité de ceux qui vivent avec le VIH travaillent ou cherchent un emploi. Mais le mépris et la discrimination auxquels sont confrontées les personnes séropositives, ou perçues comme telles, font de cette recherche une véritable gageure, et se paient par des pertes d’emploi et une pauvreté accrue. Les personnes vivant avec le VIH, découragées, ne font alors même plus le nécessaire pour accéder aux services de prévention, de traitement, de soins ou d’aide. Et c’est ainsi que se trouvent quotidiennement bafoués les droits et les libertés qui sont au cœur même du travail décent, en particulier l’égalité dans l’emploi, la protection sociale, le respect de la vie privée et la confidentialité.
Le lieu de travail est pourtant un cadre particulièrement propice à la mise en place de programmes de prévention ou de soins pour les hommes et les femmes en âge de travailler, dans l’économie formelle comme dans l’économie informelle. Il est particulièrement important de protéger les jeunes, femmes et hommes, qui sont souvent extrêmement vulnérables.
L’OIT et ses trois catégories d’acteurs – les gouvernements, les employeurs et les travailleurs – collaborant avec des réseaux de personnes qui vivent avec le VIH/sida, montre comment, à l’aide de programmes spécifiquement conçus pour le monde du travail, il est possible de contribuer à la réalisation de l’objectif des trois zéros évoqué plus haut.
Il y a dix ans, notre Organisation lançait son programme sur le VIH/sida et le monde du travail (ILO/AIDS). Outre des programmes destinés au monde du travail, nous avons conçu deux outils précieux pour orienter les initiatives qui se prennent à l’échelon mondial. En 2001, nous avons publié un recueil de directives pratiques sur le VIH/sida et le monde du travail, et en 2010, la Conférence internationale du Travail a adopté la première norme internationale du travail sur le VIH/sida et le monde du travail (recommandation n°200). Cet instrument constitue un cadre de référence qui permet d’aborder les questions des droits de l’homme, de la sécurité de l’emploi et de l’accès aux soins de santé dans la perspective singulière du monde du travail.
La recommandation n°200, qui témoigne d’un engagement résolu à tirer parti de toutes les ressources que peut offrir le monde du travail pour juguler la pandémie, a rapidement trouvé un écho partout dans le monde. En juin 2011, l’Assemblée générale des Nations Unies, réunie en session extraordinaire, a adopté une Déclaration politique sur le VIH/sida, dans laquelle les responsables s’engagent à prendre en compte «toutes les conventions pertinentes de l’OIT, ainsi que les directives que renferment les recommandations pertinentes de l’OIT, notamment la recommandation n°200».
La stigmatisation et la discrimination sont incompatibles avec les principes du travail décent et ne sauraient avoir droit de cité dans des lieux de travail et des sociétés voués à la promotion de ces principes. Il nous incombe de tirer parti du formidable potentiel du monde du travail pour définir une ligne de conduite uniforme qui constituera le point d’ancrage de politiques et de stratégies destinées à concrétiser le mot d’ordre énoncé plus haut: zéro nouvelle infection au VIH, zéro discrimination et zéro décès dû au sida.
Unissons nos efforts pour libérer le monde du travail de la stigmatisation et de la discrimination.