M. Christian Ntsay
Le BIT estime que les capacités et compétences des jeunes Malgaches
sont fortement sous-évaluées sur le marché du travail
Communiqué de presse | 22 avril 2014
Antananarivo (Nouvelles du BIT). - Lors de son point de presse à la Maison des Nations Unies le mardi 22 avril 2014, le Représentant de l’OIT à Antananarivo pour les pays de l’Océan Indien, M. Christian Ntsay, dénonce la dévalorisation des capacités et compétences des jeunes malgaches sur le marché du travail. En effet, il a déclaré que « la valeur des jeunes malgaches est largement sous-évaluée sur le marché du travail en raison principalement du manque de volonté politique à différents niveaux visant à reconnaitre leur parcours, leur capacité et leur compétence ».
L’OIT estime que les jeunes malgaches aussi bien urbains que ruraux ont le sens de créativité, de l’invention et de l’ingéniosité et c’est la raison pour laquelle nombre d’entre eux sont très performants comme employés et cadres dans les entreprises privées et l’administration publique, nombre d’entre eux arrivent à « se débrouiller » dans l’économie informelle et l’économie rurale, ainsi qu’à se démarquer brillamment dans la création et le développement des micro et petites entreprises, malgré un marché de travail largement défavorable en leur endroit, vu l’imposition des barrières insurmontables à leur recrutement, notamment l’exigence des années d’expérience pour les emplois salariés, d’une part, et des conditions dissuasives au financement de leur projet de création d’entreprise par l’exagération des apports personnels et garanties réclamés.
La politique tendant à la formalisation progressive de l’économie malgache passera inéluctablement par la prise en compte de l’importance et des besoins des principaux acteurs intervenant dans ce domaine (9 actifs occupés sur 10 se trouvent dans l’économie informelle), notamment les jeunes qui constituent aujourd’hui le réservoir le plus important en matière de capital humain et le potentiel immense en terme de compétence par rapport aux besoins de l’économie et aux défis sociaux et environnementaux.
En outre, le BIT estime que l’application réelle et concrète de la politique nationale de l’emploi adoptée en 2005 permettra inéluctablement de mettre en place à Madagascar une stratégie de valorisation de ressources humaines par le biais de l’apprentissage et de la mise en stage professionnel des jeunes. Dans ce cadre et sur le court terme, le BIT recommande que la valorisation des ressources humaines soit couplée avec un objectif ambitieux de recrutement des jeunes dans les secteurs sociaux de base pour couvrir les déficits de performance dans l’éducation, la santé, la sécurité, la nutrition et la gestion des catastrophes naturelles.
Par ailleurs, M. Ntsay insiste sur la nécessité de miser sur des mesures concrètes et rapides de défiscalisation des entreprises privées pour accroitre leur productivité, leur compétitivité et leur rentabilité afin que celles-ci créent en contrepartie des emplois pouvant ainsi relancer la consommation et la croissance. L’attractivité du secteur privé favorisera certainement une croissance rapide des investissements privés, facteur important de création d’emplois.
M. Ntsay est formel en déclarant que sans l’implication des jeunes comme moteur des activités économiques, sociales et environnementales du pays, il ne pourrait jamais y avoir une croissance réelle ni une croissance inclusive à Madagascar dans les 10 années à venir. Les expériences des vingt dernières années ont montré que le pays s’est engouffré de plus en plus dans la pauvreté massive et généralisée (taux de pauvreté de 76% et taux d’extrême pauvreté de 56%), malgré la croissance économique obtenue. En plus, la pauvreté touche énormément les jeunes à Madagascar puisque 7 jeunes sur 10 sont issus des ménages pauvres et très pauvres.
Pour le BIT, la croissance n’est pas une fin en soi et seul l’emploi est le levier le plus efficace permettant d’éliminer réellement et de façon pérenne la pauvreté pour un pays à faible revenu comme Madagascar.
Eu égard à la nécessité de stimuler le marché du travail plombé par les impacts de la double crise économique mondiale et politique intérieure, le BIT a développé depuis 2009 plusieurs modèles de relance de l’emploi à travers le salon de l’emploi. L’emploi salarié a été visé en 2009 dans le cadre du Grand Salon de l’Emploi. L’emploi salarié et l’auto-emploi par le biais de l’entrepreneuriat ont été au centre des objectifs des salons régionaux de l’emploi à Antsiranana et à Mahajanga respectivement en 2010 et en 2011. L’emploi salarié, l’entrepreneuriat et l’économie sociale ont été placés au centre des intérêts du Salon régional de l’emploi de Toliara en 2012.
Hôtel de ville de Toamasina
Cette année 2014, le BIT soutient l’initiative du monde du travail sous l’impulsion de la région Atsinanana et de la Commune urbaine de Toamasina pour organiser le Salon Régional de l’Emploi et de la Jeunesse sur l’esplanade de l’hôtel de ville à Toamasina, du 29 au 30 avril 2014. Une cinquantaine de participants ont déjà confirmé leur adhésion et leur engagement aux objectifs du salon, notamment les entreprises privées des différents secteurs économiques (tourisme, mine, port, industrie, télécommunication, agence de placement, microfinance, services aux entreprises, etc.), les secteurs publics, les institutions et centres de formation, les projets et programmes de développement, les associations de jeunes, les organisations internationales. Toamasina va ainsi accueillir des rencontres des jeunes de la Région Atsinanana au cours du salon et cela témoigne de leur prise de conscience, de leur sens de leadership, de citoyenneté, d’acteurs de la paix et d’agents de développement. Le salon de Toamasina constitue un modèle réel en miniature de promotion de l’emploi en faveur des jeunes pour le pays.
Une conférence-débat sur le thème « Emploi des jeunes, clé du développement durable » sera également animée par M. Christian Ntsay, Représentant de l’OIT, le 29 avril à 15h à la grande salle de réunion de l’hôtel de ville de Toamasina. Pour le BIT, le défi majeur aujourd’hui est de transformer la jeunesse malgache fortement déstabilisée et appauvrie en jeunesse responsable constituant ainsi un levier de développement local et national et un vecteur de justice sociale et de paix.
En définitive, le BIT invite tous les acteurs majeurs du monde du travail malgache à prioriser les stratégies et initiatives de développement visant à placer la centralité de l’emploi des jeunes au centre des priorités nationales, régionales et locales, dans le but de réduire substantiellement la pauvreté et de consolider la paix pour un développement durable.
Programmation et Communication
Bureau de Pays de l'OIT pour Madagascar, les Comores, Djibouti, Maurice et les Seychelles