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Eric Randrasana. Dans quelle galère s’est-il fourré pour oser renier ses convictions?

Solo Ignace Randrasana, le 14 juillet 2010 à la Résidence de France, Ivandry


Août 2011. Ketaka aux cheveux blancs et ses enfants et petits-enfants. Eric est à l'extrême-droite sur la photo


Lui, je ne le connais pas personnellement. Mais ses parents si, puisqu’il s’agit d’amis sinon de membres de ma famille. Sa mère est Raymonde (Ketaka) et son père Solo Ignace Randrasana, cinéaste de renom (qui appelait son fils Jean-Joël et non Eric) qui nous a quittés le 26 août 2011. Et il doit certainement lui rester quelques gènes d’un héritage de droiture et d’honnêteté quelque part. Mais… Je parle d’Eric Jean-Joël Randrasana qui vient d’être nommé en conseil des ministres du 11 janvier 2018, directeur du cabinet civil de la présidence de Madagascar. Qui est cet homme de 51 ans, marié et père de trois enfants? Et dans quelle autre galère s’est-il fourré depuis 2014?

Après deux années de droit à l’Université d’Antananarivo (EESDEGS 1985-1987), Eric a étudié la comptabilité et la finance dans une université privée et a décroché son diplôme Supérieur de Sciences Comptables (INSCAE 1988-1990) où professait un certain Hery Rajaonarimampianina. Eric Randrasana a fait son entrée dans le monde du travail dans un cabinet de comptables. Là, il a gravi tous les échelons, commençant assistant pour finir manager.

Il est ensuite engagé comme Directeur administratif et financier d’un groupe textile dont il deviendra Directeur général, avant de voler de ses propres ailes en devenant le Directeur général de la société de transit Galaxam Logistics Sarl qu’il a créé en 2002. Au fil du temps, il reconnaît avoir bataillé dur pour arriver là où il était (avant l’appel du Hery Vaovao), «à force de persévérance et de travail. Je suis intimement persuadé que ces deux notions sont les meilleures armes dans la vie». En un mot, Eric Randrasana ne doit rien à personne. Seulement voilà…

Une fois Hery Rajaonarimampianina arrivé au pouvoir, Eric Randrasana devient le spécialiste du dossier de l’African Growth and Opportunity Act (AGOA) auprès de la présidence de la République. Il est alors très optimiste:

«Lors de l’AGOA Forum à Washington en août 2014, auquel j’ai participé, un panel important de parlementaires majeurs américains, démocrates et républicains, a affirmé unanimement que la reconduction de l’AGOA n’est pas une question mais une certitude. Je ne pense pas que même si des modifications majeures sont apportées dans le cadre de l’AGOA V, celles-ci affecteront les pays les moins développés dont nous faisons partie. J’aimerais rappeler par ailleurs que l’AGOA ne concerne pas que le textile, mais englobe quelque 7000 références douanières pouvant en bénéficier. Le véritable enjeu pour nous – et l’ambition affichée – est de faire en sorte que nous profitions au maximum de ces autres opportunités pour créer des emplois, améliorer le niveau de vie du plus grand nombre et soutenir notre développement économique» (in Business magazine 23 N° 1165 – Janvier 2015).

Je ne sais pas où on en est mais, de l’AGOA, on n’en parle plus beaucoup depuis de longs mois à Madagascar…


Officiellement aussi, Eric Randrasana est Conseiller spécial du président dans le domaine de l’Economie. En janvier 2017, il est nommé membre du Conseil d’administration de la Jirama (société nationale malgache d’eau et électricité) pour «compétence particulière» mais «sans expérience notable dans le secteur énergétique», a alors écrit africaintelligence.fr… en tout cas, cela ne fait pas un pli: Eric Randrasana est bel et bien un «homme du président». Et c’est là que je me lève car ce qui suit prouve indéniablement que si le pouvoir corrompt, le pouvoir absolu corrompt absolument. Il aurait bien pu continuer à faire vivre sa famille loin des aléas conjoncturels socio-économiques auxquels est confronté la majorité des Malgaches, surtout actuellement, mais il faut croire qu’il y a, quelque part, une dette morale à honorer.

Sept ans après la création de sa société de transit, la question suivante lui a été posée, en tant que Dg: Quelles sont les qualités indispensables à un bon dirigeant? Voici sa réponse: «Il faut qu’il sache à l’avance où il veut aller, c’est-à-dire prévoir des stratégies sur le court, le moyen ou le long terme. Il faut avoir une vision claire du sens que l’on veut donner à son travail et toujours être à l’affût des opportunités. La pro-activité (faire en sorte que quelque chose se produise pour pouvoir agir) est aussi essentielle. Pour ne pas perdre le nord, beaucoup de rigueur dans la gestion et le maintien du cap que l’on s’est fixé est importante. Enfin, l’honnêteté au sens large du terme doit guider sa conduite. Honnêteté envers l’État, les employés, les clients, soi-même… etc.».

En tant que dirigeant de la nation malgache toute entière, Hery Rajaonarimampianina pratique-t-il réellement ces intimes convictions d’Eric Randrasana? Quoi qu’il en soit, à la veille de sa nomination en tant que directeur du cabinet civil de la présidence de Madagascar, il a sorti, pour le journal «La Dépêche» du 9 janvier 2018 -certainement au parfum de cette nomination-, des «vérités» qui ébranlent ses propres convictions, mélangées à des commentaires très Hvm du «journaliste» Rado Andriamampandry:


«Nous avons souvent commencé des choses sans jamais les concrétiser». C’est un triste constat que le conseiller économique de la Présidence, Éric Randrasana, a soulevé à Antaninarenina, dernièrement. En se référant à l’histoire des investissements à Madagascar, la continuité des actions déjà entreprises demeure pourtant comme étant la clé du développement, a-t-il précisé. Depuis le retour à l’ordre constitutionnel, le pays a acquis une confiance inébranlable des bailleurs de fonds, lui ayant permis de financer plusieurs projets d’envergure. Si ce n’est que pour cette année, plus de dix grands projets ont obtenu chacun un financement de centaine de millions de dollars. Et ce n’est évidemment pas pour rien. «Obtenir cette confiance pour lancer un projet est une chose. Mais la maintenir pour le concrétiser et pour que celui-ci profite réellement à la population en est une autre», a-t-il poursuivi. Or, à maintes reprises, le Président Rajaonarimampianina a martelé que ces projets ne sont pas censés se réaliser dans un court délai. «Laisser ces projets aux mains d’un autre, pour une réalisation incertaine a toujours été considéré par le Président actuel, comme étant irresponsable. Les politiciens, avec leurs égos démesurés, ont d’ailleurs tendance à abandonner des projets qu’ils n’ont pas initiés, qu’au final rien ne se concrétise», s’est-il désolé. Il y aura donc de fortes chances qu’un changement de structure changera la donne et tout remettre à zéro. Si entre 2014 et 2016, l’État s’est attelé à mettre en place le fondement, l’année 2017 est surtout considérée comme une année de concrétisation, si ce n’est que la validation des nouveaux cadres de programmation Pays pour Madagascar à savoir, ceux de la Banque mondiale, de la Banque africaine de développement, qui s’étalent dans les trois années à venir./.


Effectivement, depuis que Hery Vaovao a parlé de «rupture dans la continuité», la continuité de l’État -quel que soit le dirigeant élu- est faite pour les chiens à Madagascar. Deux jours après la parution de ces déclarations dans le quotidien «La Dépêche» donc, Eric Jean-Joël Randrasana est nommé directeur du cabinet civil de la présidence de Madagascar, succédant au titulaire Henry Rabary-Njaka, limogé en juillet 2015 (devenu Ministre des Affaires étrangères en août 2017), et à Herisoa Razafindrakoto, la fidèle parmi les fidèles, qui avait assuré l’intérim durant un temps très long… A quelques mois de la fin du mandat du président Hery Rajaonarimampianina, quelle potion miraculeuse Eric Randrasana, issu du secteur privé, va-il concocter pour faire perdurer celui qui l’a embarqué dans le domaine de la politique politicienne publique où il ne sera jamais qu’un novice qui débute? Une «menace» pour les «zanak’an-trano»… En tout cas, il doit savoir pertinemment qu’en affaire il n’y a pas de philanthropie et que le temps c’est de l’argent («time is money»). La grande question est donc de savoir pour qui roule ces deux hommes de même formation: pour ce régime Hvm au bord de l’implosion ou pour le plus grand nombre de Malgaches?

Vu le peu de temps imparti (politique) qu’il leur reste, je ne crois pas au miracle mais je ne peux en vouloir tout à fait à Eric Randrasana même si, désormais, il doit quelque chose à quelqu’un. Qu’il le veuille ou non. Dans la vie, on a toujours le choix et refuser en est un. Au fait, connaissez-vous le travail d’un directeur de cabinet, poste à très haute responsabilité s’il en est? Non? Voici:

Le directeur de cabinet est souvent le plus proche collaborateur de son patron, qu'il seconde dans ses prises de décision. Son rôle est d'ordre politique et le profil repose sur les critères suivants selon Wikipédia:

* Politique (relation avec les formations politiques, gestion des élus, stratégie, notes d'analyse, plume) ;

* Technocratique (note d'analyse, gestion de dossiers complexes ou sensibles, relations avec des institutions, mise en œuvre et suivi d'initiative politique) ;

* Superintendance (facilitateur, organisateur, gestion d'agenda et communication).

Gageons que le salaire et les avantages -payés par le contribuable malgache- sont à la hauteur de la tâche… Ceci explique donc cela, hors esprit patriotique, I’m sure.

Jeannot Ramambazafy – 14 janvier 2018

Mis à jour ( Dimanche, 14 Janvier 2018 10:41 )  
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