Décidément, la force nouvelle pour Madagascar («Hery Vaovaon’i Madagasikara») va finir par faire de la Grande île un vaste chantier financier tous azimuts où les Malgaches finiront par devenir des apatrides chez eux. Et après le Hvm, le déluge ?
Dernier exploit en date, un contrat entre l’Etat de Madagascar et le groupe CIOA (Centre International d'Opportunités d'Affaires) portant sur 10 millions de dollars. Mais, derrière cette annonce mirifique, il existe une opacité assez extraordinaire, des tas de « pare-feux » pour protéger des intérêts… présidentiels, pour ne pas dire plus.
Le samedi 18 avril 2015, la signature de ce contrat a eu lieu au siège du CIOA à l’immeuble « Le Nobel », avenue de l'université, 83160 La Valette-du-Var, près de Toulon en France. Selon donc le communiqué du COIA : « L'objet du contrat concerne la 1ère tranche, portant sur 700 logements, d'un vaste programme d'accès à la propriété au bénéfice des fonctionnaires du pays.  L'Etat de Madagascar associe le Groupe CIOA à son plan visant à l'amélioration des conditions de vie des Malgaches ».
Vonison Andrianjato Razafindambo, Ministre de la Communication et des Relations avec les Institutions de Madagascar (lunettes à branches noires) et Léon Lucide, Président du CIOA prenant la pose après la signature du contrat. Ce, en présence de Ratiarison Andrianarimanana Nivoarivony, Directeur de Cabinet du Ministre, Ousseni Youssoufou, le représentant commandité de CIOA à Madagascar, et Chantal salinière, cofondatrice de CIOA, épouse de Léon Lucide, en charge de l'administration et des finances du groupe
Très bien. Nous aurions tous applaudi si ce n’est des zones d’ombre entourant ce contrat. Il n’y a rien à reprocher au CIOA mais c’est du côté de « l’Etat de Madagascar » que c’est très flou. Déjà , si c’est pour le bénéfice des fonctionnaires du pays, c’est-à -dire des travailleurs de l’administration publique (« Fanjakana »), une offre publique de marché aurait été la démarche universellement suivie. Par ailleurs, pourquoi est-ce le Ministre de la Communication et des Relations avec les Institutions, Andrianjato Vonison, qui est allé signer ce contrat ? Et non pas le Ministre de la Fonction publique ou celui des chargé infrastructures tout aussi publiques ? Ce n’est pas simple comme bonjour, hélas.
Un des proches collaborateurs de ce ministre, Ramarolahy Safidy, a été bombardé directeur des Opérations de CIOA-Madagascar par le Mahorais Ousseni YOUSSOUFOU, lui-même représentant commandité de CIOA à Madagascar. Or, il existe sur place, depuis 2013, le CMOA (Centre Malgache d'Opportunités des Affaires) entreprise licenciée par le groupe CIOA pour diriger la filiale CIOA Madagascar. Que s’est-il donc passé entre-temps ? Ben l’accession au pouvoir du candidat par substitution, Hery Rajaonarimampianina qui a tout mis sens dessus-dessous, mettant l’accent sur le copinage et le népotisme.
Paris, décembre 2014. Les Martiniquais Laetitia Lucide, Léon Lucide, Chantal Salinière, Brigitte Marry et Cédric Zéline (Photo:Léia Santacroce)
Quelle est la raison d’être du CIOA fondé par des Martiniquais, et qui vient faire son entrée sur le Marché Libre d'Euronext Paris en décembre 2014 ? Le groupe CIOA (Centre International d'Opportunités d'Affaires), est « une place de marché, qui assiste les entreprises membres pour vendre, acheter, nouer des partenariats ». Par ailleurs, le chiffre d'affaires du CIOA vient de deux sources : des PME membres (abonnements pour accéder à la place de marché, honoraires de services de support et commissions d'intermédiation) et des partenaires qui participent au développement du réseau CIOA à travers le monde (droits territoriaux, redevances).
Bref, Il n’y a pas de philanthropie dans le monde des finances qui connaît des hauts et des bas… Ainsi, toujours selon le communiqué : « Le CIOA assurera l'ingénierie globale de l'opération, mettra les moyens de son pôle « Constructions Alternatives » au service de l'Etat Malgache, qui apportera pour sa part les terrains. Le financement est assuré par BANK OF AFRICA qui octroiera aux bénéficiaires, des prêts bonifiés sur 20 ans, garantis par une cession sur salaire. Le lancement de cette opération : 3ème trimestre 2015 ».
Le président Rajaonarimampianina avait fait une annonce au sujet de ces logements mais ne savait même pas, à ce moment précis, comment procéder. C'est fait. Merci à Andrianjato Vonison, ancien journaliste, devenu donc ministre "mpanera" (intermédiaire) de BTP, entre-temps
Déjà , cela va faire certainement faire tiquer, une énième fois, les bailleurs de fonds traditionnels, les partenaires techniques et financiers, mais surtout les entrepreneurs malgaches qui, une fois encore, sont mis sur la touche. Mais encore : de quels terrains s’agira-t-il ? Et pour quel genre de fonctionnaires ces 700 logements seront-ils destinés ? Au dernier recensement, il y aurait 150.000 fonctionnaires à Madagascar sans compter les fonctionnaires fantômes. Enfin, il est évident qu’il ne s’agit pas d’un don. Comment l’actuel « Etat de Madagascar » compte-t-il rembourser avec les intérêts ? Tout simplement en endettant sur 20 ans les « bénéficiaires ». Mais tout le monde sera mort d’ici là , obéré de dettes (« bokan’ny trosa ») ! Il y aura, certainement aussi, des sous-locations et des "accaparements" dans l'air. Et les tenants de cet actuel « Etat de Madagascar » ne seront plus là où ils trônent de nos jours. Et encore si ce projet ne s'écroule pas sous le poids des dettes. Sans compter les fluctuations de tout marché boursier. Enfin, vous ne connaissez pas les 20.000 logements de Didier Ratsiraka ?
10 millions de dollars, çà fait beaucoup en ariary… Et ce n’est donc qu’une avance. Allez encore prétendre que ce régime est… normal. Il n’y a aucune faute, je le répète de la part du CIOA, étant donné que ce genre de transaction (il n’y a pas d’autres mots) constitue sa raison de vivre. Mais C’est quoi exactement « l’Etat de Madagascar » sous Hery Rajaonarimampianina ?
Jeannot Ramambazafy – 22 avril 2015