La véritable locution est « Masoandro mody », littéralement soleil couchant. Effectivement, à 75 ans (le 4 novembre dernier), on ne pourra jamais parler d’aube ou d’aurore. L’amiral Didier Ratsiraka est bel et bien sur le seuil de sortie de sa vie terrestre. Il compte donc vivre ses derniers jours ici-bas sur la terre qui l’a vu naître.
Didier Ratsiraka alors attaché militaire à l’ambassade de Madagascar à Paris. Un destin inattendu mais une fin assez minable. Deux fois obligé d’aller s’exiler en France. Et il compte rempiler...
Tenu par le devoir de réserve depuis presqu’une décennie, Didier Ratsiraka compte être politiquement loquace une fois à Madagascar. Le mercredi 23 ou jeudi 24 novembre 2011. Il paraît qu’il a deux ou trois propositions à soumettre pour la sortie de cette crise actuelle de politiciens. Serait-il devenu amnésique au point d’oublier que le temps n’efface jamais les crimes commis ?
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La meilleure des choses qu’il puisse faire, avant de cultiver l’art d’être grand-père, sera de demander pardon aux familles de tous les gens sur qui il a fait tirer aux environs du palais d’Iavoloha, le 10 août 1991. Il y a 20 ans. Ironie de l’histoire, son nom de code, entendu dans la vidéo retraçant ce massacre, était « Masoandro » ou soleil. Certes, au début des années 1970, ce jeune officier fringant faisait figure d’un astre qui a fait fermer la station américaine de la Nasa d’Imerintsiatosika. Mais il est également l’artisan de la sortie définitive de Madagascar de la zone « Franc ».
Dernière photo officielle de cet officier supérieur dont l’intelligence ne lui a pas beaucoup servi
Par ailleurs, ayant nationalisé toutes les entreprises à caractère stratégique, c’est lui-même, deux décennies plus tard, qui en a entamé les privatisations. Dès lors, quelle sorte de propositions peut-on attendre d’un vieil officier supérieur dont les vues (celle des yeux et celle de l’esprit) baissent avec le temps (va tout s’en va)? Selon le prince Elakovelo, il aurait réussi à amasser la somme d’un million de dollars (destiné à l’organisation d’une conférence entre lui, Zafy Albert, Marc Ravalomanana et Andry Rajoelina). D’où provient ce pactole ? Là n’est pas mon propos, l’argent n’ayant pas d’odeur.
Photo de la video qui a été la cause de la fermeture, par le pouvoir Ravalomanana, de la station Viva ayant enclenché la révolution Orange de 2009
Mais si c’est vrai, il aura tout intérêt à se faire petit et à se couler des jours heureux -pas mérités du tout- avec ses petits-enfants. Hélas, les fantômes des gens abattus le 10 août 1991 ne lui laissera pas de répit. Il finira sa vie à vouloir se justifier, se rattraper de ses erreurs qui l’on conduit à s’exiler par deux fois. Sans que les Malgaches n’aient vu la sortie du tunnel, les 20.000 logements et l’autosuffisance alimentaire ainsi que la santé pour tous. Mais à son corps défendant, ses successeurs n'ont pas fait mieux. Bien au contraire. D'où cette crise actuelle qui risque de perdurer avec le retour de ce soleil terni par les outrages du temps.
Didier Ratsiraka, de nos jours, porte bien ses 75 ans
Certes, Didier Ratsiraka risque de vivre centenaire mais à quoi cela lui servira avec tous les fardeaux, tous les morts qui hantent son esprit ? Certes, on peut lui pardonner mais on n’oubliera jamais… Le soleil va rentrer. Mais de ses rayons risquent fort d’émaner une autre forme de « chaleur ». Celle de l’enfer des batailles de leadership au sein du parti Arema marxiste qu’il a créé de manière paradoxale à sa formation militaire française. 75 ans, ce n’est pas non plus l’âge pour se refaire une nouvelle vie. Et Madagascar sera encore le théâtre de nouvelles conneries politocardes au nom d’un pouvoir deux fois perdus, après la révolution socialiste et la république humaniste écologique. Osera-t-il proposer la république « zanahariste diamantifère fédéralique » ? Tout est possible à Madagascar. Même l’impossible. Déjà le petit Tantely Andrianarivo -ancien cadre de la Banque nationale d'investissement nommé Premier ministre par l'Amiral-, qui se croit tout permis désormais, lance que "Didier Ratsiraka appartient à tous les Malgaches". Donc à la justice malgache aussi car pour les crimes de sang, il n'y aura jamais de prescription. Jamais. Ô ry zalahy a ! Ny mangina anie ka volamena e ! (Les gars, rappelez-vous que le silence est d'or). Vos logorrhées vont finir par réveiller les morts.
Jeannot Ramambazafy – 20 novembre 2011
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ARCHIVES HISTORIQUES A NE JAMAIS OUBLIER
De Didier Ratsiraka, en passant par Albert Zafy et Marc Ravalomanana, il est clair que ces trois personnalités ne devraient plus s’immiscer dans les affaires du pays. Haut et fort, la génération d’aujourd’hui devrait savoir qu’un certain Didier Ratsiraka a déjà été condamné en 2003 par contumace par la Cour correctionnelle pour avoir détourné des deniers publics d’une valeur de 50 milliards à la Banque centrale de Toamasina. Toujours durant la même époque, le vice-Premier ministre, Pierrot Rajaonarivelo, et deux de ses complices viennent d’être condamnés par la Cour criminelle pour avoir détourné, entre 1997 et 2002, plus de 26 milliards de Fmg au préjudice de l’Etat malagasy. Et la liste risque d’être longue si on cite encore les avoirs de l’ancien Premier ministre, Tantely Andrianarivo, dans les banques suisses. Ravalomanana, le meilleur… C’était pendant la période de la 2e République, mais le délit est encore plus sévère lors de la période de Ravalomanana. Le régime de celui-ci n’a rien de transparent dans ses pratiques, comme il le prône assez souvent dans ses discours. En septembre 2002, Marc Ravalomanana s’offre un Boeing 737-300 aménagé en avion privé. Il n’y avait aucune transparence quant au réel prix de l’appareil. 8 millions de Dollars avaient été acquittés auprès de Lauda Air, compagnie propriétaire de l’Aéronef alors que 11 millions de Dollars avaient été décaissés de la Banque centrale. En 2009, un nouvel avion débarque. Cet appareil valait 60 millions de Dollars. Selon le ministre des Finances de l’époque, Hajanirina Razafinjatovo, la moitié du prix aurait été payée par Ravalomanana lui-même, tandis que la moitié par Daewoo Logistics. Mais curieusement, la Banque centrale a opéré un virement de 60 millions de Dollars en France. Et la liste est longue : en 2004, la Caisse d’épargne a dû prélever et transmettre au ministre des Finances de l’époque, Radavidson Andriamparany, 4 milliards d’Ariary en espèces pour les besoins immédiats de l’Etat malagasy. D’énormes sommes ont été soustraites de la Banque centrale et de ses agences en Province, à l’instar des 12 milliards d’Ariary à Manakara. Des opérations du même type ont été effectuées auprès des agences de Toamasina, Sambava et Morondava. Malheureusement, pour les citoyens pris en otage, les bavures continuent. Pendant le régime transitoire, des ministres ont pu s’offrir de luxueuses villas le temps de leur passage au Gouvernement, selon toujours le rapport de la Sefafi. Les trafics de bois de rose sont devenus un dossier à rebondissements sans que l’Etat n’ait pu lever le voile sur ces affaires juteuses. La population reste la seule victime. La plupart des personnes incriminées arrivent à passer à travers les mailles du filet des organismes chargés de veiller à la saine gestion des finances publiques et celles de la Justice, et selon l’ « Observatoire de la vie publique », c’est la population qui paie. Ce sont les fonctionnaires qui souffrent du retard des salaires ; ce sont les secteurs privés qui souffrent de nouvelles dispositions fiscales afin de renflouer les caisses de l’Etat. Bref, les Malgaches ont toujours souffert et souffriront toujours de cette mauvaise gestion des deniers publics, perpétrée par des politiciens. Shania Andonjanahary- Journal "LA VERITE" du 5 avril 2011 |