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Razafisambatra Louis De Mon Désir: lettre ouverte à la Communauté internationale

Sans avoir pu anticiper des résolutions fiables à la crise politique de 2009, les émissaires de la communauté internationale avaient pris comme solution la disqualification des quatre ex chefs d’État à la dernière élection présidentielle. Comment parler d'une élection démocratique, alors qu'une masse d'électeurs, partisans des anciens Présidents, ne s'est pas exprimée aux urnes? Mais curieusement et paradoxalement, les représentants de la communauté internationale avaient fait avaler par la population malgache la pilule amère de ce grave déficit démocratique par le jeu habituel de la reconnaissance internationale visiblement fondée sur des intérêts stratégique et économique. Permettez-moi de soutenir qu'ils ne se sont pas posé très sérieusement la question du diagnostic de cette crise, donc des causes profondes qui en sont à l'origine.

Le drame est que La communauté internationale a refusé non seulement la nécessité d'un grand débat national pour débattre tous les problèmes de fond afférents à la crise répétitive à Madagascar, mais encore sa réconciliation avec le peuple malgache. Maintenant, il faut qu'elle se rende à l'évidence de ses erreurs historiques parce que est très clair: le Président de la république Hery Rajaonarimampianina et son équipe ne veulent pas instaurer une République des idées pour pouvoir faire des arrestations arbitraires des opposants hostiles à ce système de corruption généralisée;

Par voie de conséquence, quelques membres de la communauté internationale doivent reconnaitre leur part de responsabilité dans cette extrême pauvreté de la majorité des Malgaches pour les raisons suivantes:

La Banque Mondiale et le Fonds monétaire international n'avaient réalisé que des programmes d'assistance morcelés ne soulageant même pas les souffrances d'une bonne frange de la population appauvrie; autant dire, en aucun cas, ces infimes réalisations ne s'inscrivent pas dans le cadre d'une politique de développement mutuel gagnant-gagnant, comme le font déjà maintenant les nations des BRICS avec d'autres pays d'Afrique:

- ils n'ont pas priorisé l'agriculture vivrière, l'élevage, les ressources halieutiques;

-  ils avaient imposé une certaine sagesse conventionnelle par le truchement du fameux programme d'ajustement structurel, qui est en décalage aux réalités malgaches; celles-ci restent brouillées par la complicité des intérêts financiers des lobbies internationaux et de l'oligarchie nationale très corrompue. La vie économique de Madagascar est toujours dominée par certains grands actionnaires plus noblement appelés investisseurs.

Évidemment, ce qui les arrange c'est ce qui ne gêne pas les intérêts économiques, politiques et sociaux dominants. C'est une façon de mettre de mettre en exergue que la Banque Mondiale et le FMI, sur la base des pressions financières et politiques continuent de cultiver leur propre version de la vérité; une version qui n'a presque pas de lien indispensable avec le réel malgache. Jusqu'à présent, ils arrivent à cacher un certain mensonge innocent; d'où  l'absence de sentiment de culpabilité et de responsabilité de leur part. Malheureusement, à ce moment dit moderne, les courants de pensée actifs dont libéral, social démocrate ou socialiste, offrent des motivations financières à une volte-face très favorable aux intérêts privés et au détriment des populations pauvres dans le monde. Autrement dit, le capitalisme, avec son signifiant historique, frôle presque totalement l'inacceptable, mais on l'a redoré  pour tromper l'opinion publique dans les pays sous développés.

Par-là même, les dirigeants politiques se font embourber, consciemment ou involontairement, dans un univers célèbre pour ses mensonges: le monde de la finance. On leur dicte une soit disant évidence indiscutable, c'est-à-dire on ne peut pas anticiper avec certitude le comportement futur de l'économie, le passage  des périodes fastes à la récession ou à la dépression et vice versa. Sans entrer dans les détails, la machine à fabriquer des subterfuges dans la dite Économie et Finance internationales, est formidable:

- il n'est pas superflu de rappeler que le dégraissage des fonctionnaires dans les années 1980-1990 a entrainé une génération sacrifiée, qui se trouve actuellement à l'âge de retraite sans avoir travaillé durant leur vie. Je laisse à vos trésors d'imagination pour savoir les dégâts humains afférents;

- la Banque Mondiale et le FMI obligeaient les pouvoirs successifs à accepter le fanatisme du marché et n'avaient pas dit la vérité sur les crises quasi chroniques subies par l'ultralibéralisme; en effet, tout le monde remarquait leur silence face à l’ex Union Soviétique où la transition du communisme au marché provoquait une terrible chute des revenus;

- officiellement, ils exigent la transparence, mais en aucun cas ils n'ont pas fait d'effort pour faire comprendre les forces et les limites de « l’économie de marché »;

- et quand on cherche à remettre en cause la véracité des affirmations générales sur l'efficacité du marché et  l'axiome selon lequel le libre échange garantit le bien-être, ils brandissent la menace de blocage de leur financement et l'embargo même; en d'autres termes, à tous les coups, on met les bâtons dans les roues pour que la mondialisation ne marche pas favorablement pour les pays pauvres;

- tout espace pour développer certaines réformes du système financier mondial et des institutions financières internationales demeure presque un sujet tabou et donc quasi interdit; a fortiori, la construction d'un système économique et politique international fondé sur des valeurs et des principes, en guise d'exemple des accords commerciaux pour assurer véritablement le développement équilibré des nations faibles économiquement, relève pratiquement des rêveries jusqu'à preuve du contraire; le régime commercial bénéfique pour les intérêts industriels et financiers et nuisible pour ces dernières étant défendu par diverses subtilités sans scrupules;

- ces bailleurs de fonds traditionnels n'ont jamais voulu impulser d'autres formes possibles d'économies de marché efficaces  pour la seule raison qu'ils veulent à tout prix une mondialisation qui rend in æternam plus difficile d'avoir un juste équilibre entre l’État et le marché;

- les orientations recommandées par les envoyés fidèles de la Communauté internationale n'ont pas aidé Madagascar à se développer et à assurer un partage plus équitable des fruits de la croissance économique.

Certainement, je ne défends pas les dirigeants corrompus, mais je dénonce toute diabolisation systématique de la Banque Mondiale et du FMI  pour couvrir leur échec dans notre pays; la  privatisation en est éloquente.

- Le désengagement de l’État dicté par le FMI n'avait pas autorisé en fait les interventions souhaitables de l’État malgache sur le marché, en l'occurrence les mesures qui peuvent vraiment guider la croissance économique et améliorer le sort de nos compatriotes.

Nos concitoyens n'ont pas été mieux informés par les institutions internationales sur ce qu'elles font; ces dernières n'ont pas donné à ceux  qui vont subir  les effets de leurs décisions la possibilité d'intervenir davantage dans la conception de ces mesures.

En conclusion partielle, la Communauté internationale ne s'est pas forcée d'élaborer une politique et une philosophie économiques qui envisagent l’État et les marchés dans un rapport de complémentarité, de partenariat. Et si les marchés se trouvent au centre de l'économie, l’État a également un rôle primordial à jouer. Certainement, je ne suis pas naïf pour croire que l’État peut remédier à toutes les lacunes des marchés; je ne suis pas non plus né de la dernière pluie pour imaginer que les marchés vont résoudre l'ensemble des problèmes sociaux.

Bref, même en cas de crise, le FMI n'a pas à prescrire des solutions standards, archaïques et inadaptées; il doit tenir compte des conséquences sur les peuples auxquels elles vont s'appliquer.

Surtout, étant donné la situation de précarité des malgaches ,la Communauté internationale devra considérer toute descente dans la rue de la population en difficulté comme raisonnablement légitime; elle est dans l'obligation de reconnaitre que c'est l'inexistence de solutions et la psychose de peur des dirigeants actuels qui les poussent à associer toute revendication bien fondée de diverses catégories sociales à un quelconque coup d’État. En tout cas, tout projet de coup d'État véhiculé  à la presse depuis un an est  une simple manœuvre politique pour incarcérer en prison les adversaires politiques.

MADAGASCAR A BESOIN d'un débat de fond franc et ouvert avant toute élection présidentielle pour éviter les crises chroniques; ceux qui s'y opposent seront responsables d'éventuels événements imprévisibles.

La Communauté internationale est actuellement tenue de reconnaitre que nous sommes une communauté mondiale et il, nous faut respecter des règles pour pouvoir vivre ensemble; ces règles sont sensées à être équitables, justes et très lisibles. Elles doivent faire preuve d'honnêteté et de justice sociale. En ce XXIème siècle, elles doivent être fixées par des procédures démocratiques.

Je souhaite que les bureaucrates internationaux, normalement vrais symboles d'un nouvel ordre économique mondial, ne soient plus partout assaillis et ne se heurtent pas au théâtre de combats de rue acharnés et d'énormes manifestations.

Paris, le 23 juin 2016


RAZAFISAMBATRA Louis De Mon Désir

Mis à jour ( Jeudi, 23 Juin 2016 19:24 )  
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