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Malagasy crisis : Remember Samora Machel and others…

Titre anglais accrocheur, certes, mais qui traduit le bruit épouvantable d’un avion qui tombe et dans lequel périssent de hauts dirigeants d’une nation. Dernier en date, « l’accident » qui a littéralement décapité le pouvoir en Pologne. Un crash qui a eu lieu à Smolensk en… Russie. Y-aurait-il aussi un cycle dans ce genre de catastrophe ? Qui le sait…

Pik Botha, PW Botha, Samora Machel et Joaquim Chissano à Komatipoort lors de la signature de l’accord de Nkomati (1984). Que regardaient-il en l'air ?

Mais, en matière d’assassinat politique, impossible n’existe pas. A la veille du sommet de Pretoria (Afrique du Sud) concernant la crise à Madagascar (à compter du 28 avril 2010), il existe des éléments et des personnalités qui sont mêlés, directement ou indirectement, à ces « accidents » qui, pourtant, avec le temps, n’ont guère arrangé les « choses ».

Le Tupolev "Air Force One" mozambicain de l'époque. En médaillon, ce qu'il en est resté, après le crash du 19 octobre 1986, sur les monts Mbuzini en Afrique du Sud

Quoi qu’il en soit, il y a toujours un mobile, des intérêts, plus financiers qu’idéologiques, en jeu. A titre de prévention, il importe de rappeler des faits pas étranges du tout, lorsque l’on connaît bien l’Histoire de l’humanité elle-même. Le 19 octobre 1986, l’avion Tupolev Tu-134A-C9-CAA, destiné à transporter les dirigeants du Mozambique (une sorte d’Air Force One) s’écrase en… Afrique du Sud. Plus exactement, il s’est écrabouillé sur le flanc des monts Lebombo, près de Mbuzini. Ce crash coûte la vie à Samora Machel. Celui qui lui succèdera se nomme Joachim Chissano alors ministre des Affaires étrangères…

Joachim Alberto Chissano, président après l'assassinat de Samora Machel (1986); Didier Ignace Ratsiraka, président après l'assassinat de Richard Ratsimandrava, chef d'Etat et de gouvernement (1975). Tous deux ont été ministres des Affaires étrangères et tous deux, présents dans la Capitale du Sénégal, savent que Marc Ravalomanana n'a jamais respecté les accords de Dakar I et II (2002).

Tous les deux appartiennent au FRELIMO (Front national de libération du Mozambique). Il semble bien que le Mozambique a été, un temps, le pays des assassinats présidentiels. Figurez-vous que le prédécesseur de Samora Machel, Eduardo Mondiane, fondateur du FRELIMO a été assassiné en 1969. Ce ne fut pas à travers un « accident » d’avion, mais il faut avouer que Chissano est un habitué de ce genre de « solution ». En passant, Joachim Alberto Chissano et Didier Ignace Ratsiraka ont eu le même parcours : tous deux ont « hérité » directement de l’assassinat du président de leur pays respectif pour les remplacer et tous deux ont été ministre des Affaires étrangères. Etranges affaires, n’est-il pas ?... Et tous les deux savent que Marc Ravalomanana n’a jamais respecté les accords signés de Dakar I et II en 2002.

Samora Machel, immortalisé sur un billet de banque

A présent, qui a eu intérêt à tuer Samora Machel ? A l’époque, l’apartheid sévissait encore en Afrique du Sud. Et le Mozambique était réputé pour abriter des bases de l’ANC (African National Congress) de Nelson Mandela. Voilà déjà un mobile apparent. Avant « l’accident », justement, Samora Machel, « marxiste » ami de Didier Ratsiraka, venait de participer à un sommet à Lusaka (Zambie) pour tirer au clair le fait que la Zambie, l’Angola, le Zaïre et le Malawi finançaient la RENAMO (Résistance nationale du Mozambique), opposition armée contre le gouvernement mozambicain et notoirement soutenue par les autorités sud-africaines. Nous sommes vraiment au cœur d’un roman d’espionnage. En 1987, le juge sud-africain Cecil Margo rend le verdict de l’enquête effectuée par la commission portant son nom (Commission Margo) : erreur de pilotage. Une fausse balise radio aurait été utilisée pour tromper le pilote qui, dès lors, avait dévié de sa trajectoire. Un documentaire avait même été réalisé à ce sujet, diffusé sur la chaîne SABC3 : « Death of a President » : On the night of Sunday 19 October 1986, the Mocambique presidential aircraft, a Tupolev TU 134A turned towards the South African border in response to signals from a VOR (a very high frequency omnidirectional radio), which was eminating not from Maputo, but from the crash site on the Lebombo mountain near Mbuzini, Nelspruit. The South African police arrived on the crash site four and a half hours after the crash. It was alleged that they initially ignored the dead and wounded people and started collecting the documents papers scattered around the scene as well as the victims' valuable personal items and cash. Foreign Minister, Pik Botha, Niel Barnard, head of the National Intelligence Service, who arrived later, admitted that the documents had been removed from the scene for copying. Mozambican authorities were only informed about the incident nine hours after it had happenned.

Malgré maintes réouvertures de l’enquête, le black-out est total sur cet « accident ». Pour en savoir plus, je vous recommande le roman de Deon Meyer : « Lemmer, l’invisible ». Vous lirez que la fiction amène à la réalité…

Magnus Malan

En tout cas, dans le contexte politique de l’époque, lié à l’apartheid, des témoins affirment que le président Samora Machel avait été menacé par Magnus Malan, alors ministre sud-africain de la Défense, quelques jours avant le crash à Mbuzini. Quoi qu’il en soit, le premier bénéficiaire de cet « accident » aura été Joachim Chissano qui est resté 19 ans au pouvoir au Mozambique (6 novembre 1986-2 février 2005), sans avoir été confronté à de tels « problèmes »… A Madagascar, à la même année 1986, plus exactement au mois de mai, le crash d’un avion DC-3 a lieu dans le Vakinankaratra, à Ampamoizankova. Parmi ceux qui ont péri dans cet « accident » (erreur de pilotage aussi ?) : le Contre-Amiral Guy Sibon, alors ministre de la Défense de Didier Ratsiraka et le Colonel Hubert Andrianasolo, Directeur général de l’OMNIS (Office militaire national pour les industries stratégiques) ainsi que son épouse. Il y a toujours des militaires dans ces histoires d’accidents d’avion en Afrique.

Les premiers secours à Ampamoizankova, en mai 1986

Le crash d’Ampamoizankova n’aura pas été le premier à Madagascar. En juillet 1976, un hélicoptère Alouette III se crashe à Ankazomiriotra, tuant le Colonel Joël Rakotomalala, Premier ministre de Didier Ratsiraka ; le Colonel Alphonse Rakotonirainy, Chef d’Etat-major de l’armée et un journaliste de la Tvm, Victor R. Seul accident authentifié comme tel, celui du DC-4 au décollage d’Ivato, le 19 juillet 1967, qui a coûté la vie à Albert Sylla, ministre des Affaires étrangères de Philibert Tsiranana et père de feu Me Jacques Sylla ancien Premier ministre de Marc Ravalomanana. Dernier « incident » réel aussi stupide que comique, celui de l’hélicoptère où se trouvait Marc Ravalomanana qui a atterri « brutalement » à Imerin’Imady, en octobre 2005. Plus de peur que de mal. Il apparaîtrait que c’est lui qui avait insisté pour être aux commandes.

Une série de timbres malgaches démontrant que le régime Ratsiraka-Arema était vraiment tous azimuts ! En haut, à droite, Samora Machel. Pour les autres, à vous de les reconnaître

A part l’incident d’octobre 2005 à Madagascar, quels auraient été les enjeux de voir disparaître des dirigeants de manière peu naturelle ? Tout est axé sur des intérêts financiers gigantesques plus que sur des considérations idéologiques. Depuis toujours, la Grande île de l’océan Indien est un vaste terrain dont le potentiel naturel et minier fait l’objet de « disputes » entre deux pôles distincts : l’Amérique du Nord et l’Europe, particulièrement la France, ancien pays colonisateur. L’antagonisme Ravalomanana/Rajoelina devient un casse-tête pour ces deux pôles. Marc Ravalomanana, taxé d’anglophone, a été immédiatement reconnu par les Etats-Unis de George W. Bush en mai 2002, contrairement à la France qui n’a envoyé Dominique de Villepin qu’avec beaucoup de retard, malgré les gros sous qu’il avait apporté en sous-main. Mais, dès son second mandat, Marc Ravalomanana s’est montré trop gourmand et s’est tourné vers d’autres cieux (Corée du sud, Chine) pour son développement personnel. Ce second mandat a été brutalement interrompu par le soulèvement populaire de 2009, dirigé par Andry Rajoelina. Celui-ci est étiqueté pro-français. D’où la sacrée union des pays anglophones de la Sadc, incluant Joachim Chissano, qui roulent pour Ravalomanana.

Magnus Malan et Pik Botha en 1987. Ils font vraiment penser à des parrains de la maffia italienne. Non ?

L’on sait pertinemment que la France ne fait plus dans le « spectaculaire » depuis l’affaire « Rainbow Warrior », en juillet 1985, ayant impliqué le Commandant Alain Mafart (Alain Turenge) et le Capitaine Dominique Prieur (Sophie Turenge), des services secrets français. La subite « disparition » d’Andry Rajoelina, dans une région propice à tous les « accidents » d’avion possibles, n’arrangerait pas la crise politique malgache. Au contraire. Malheureusement, Marc Ravalomanana est un homme qui n’a plus rien à perdre et qui ne s’est pas enfui les mains vides. Lorsque l’on en arrive à ce stade, c’est la vengeance immédiate qui prime et non pas les impacts sur un long terme. La question, dès lors, n’est pas « faut-il ou non qu’Andry Rajoelina aille à Pretoria » ? La question est : quelles sont les garanties pour qu’il ne devienne pas un martyre aussi inutile qu’encombrant ? Car ce n’est pas sur la table des négociations qu’il risquera d’y avoir des « erreurs  de pilotage ».

L'ombre de Magnus Malan plane sur ce trajet. Surtout au retour...

Et voyageant comme il le fait dans un jet privé, il ne sera jamais à l’abri de missiles sol-air tirés de n’importe où dans l’espace aérien sud-africain ou au-dessus du canal du Mozambique. Ce voyage à Pretoria n’a rien de semblable aux précédents (Maputo et Addis-Abeba). Les enjeux ne seront pas les mêmes. Actuellement, Marc Ravalomanana est acculé et à bout d’argumentation. Il risque d’être expulsé d’Afrique du Sud et aucun pays ne veut de lui. Sauf le Zwaziland, peut-être.

Swaziland ! Paradis de la polygamie. Première étape de l'exil africain de Marc Ravalomanana

Il n’émet rien directement, à propos du communiqué conjoint des ambassadeurs sud-africain et français, mais laisse le soin à ses sous-fifres patentés, champions de la désinformation, pour semer la confusion. Aussi, je le répète : que les ambassadeurs français et sud-africain soient dans le même avion que lui à l’aller comme au retour. Ainsi, la protection, avec ces représentants de deux grandes nations à bord, sera encore plus rapprochée (avions d’escorte). Si ce n’est pas « possible », alors là, il y aura vraiment un problème. Et qu’Andry Rajoelina apprenne aussi à s’imposer comme tout homme d’Etat qui se respecte mais qu’il ne passe pas cette période transitoire à toujours subir. Car pour certains, la solution est… finale et advienne que pourra. Un homme averti en vaut deux mais un homme avisé en vaut quatre. Et encore une fois : rien n’est impossible ici-bas.

Remember Samora Moisès Machel !

Jeannot RAMAMBAZAFY

Mis à jour ( Lundi, 26 Avril 2010 15:03 )  
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