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Rencontre Rajoelina/Ravalomanana: l’accord politique logique et salvateur

Marc Ravalomanana et Andry Rajoelina, en décembre 2007. Le vrai accord politique salutaire pour le peuple malgache est qu'aucun d'eux ne se présente à la prochaine élection présidentielle

Décidément, cette Sadc est vraiment une entité exceptionnelle. En effet, c’est dans les journaux, étrangers qui plus est, que le public malgache -celui qui ira aux urnes- a eu connaissance de cette rencontre Rajoelina/Ravalomanana dans l’archipel des Seychelles.

Le dernier de ces journaux anglophones qui parle de cette rencontre, à partir du 25 juillet 2012, est le Saturday Nation en date du samedi (évidemment) 21 juillet 2012. Un journal... kenyan en plus !

Titre : Madagascar rivals to meet next week

Madagascar's rival leaders, exiled president Marc Ravalomanana and transitional strongman Andry Rajoelina, will have an unprecedented meeting in the Seychelles Wednesday, a source close to its preparation said. "The one-on-one starts on the 25th and we are hoping to get an agreement then", the source told AFP on condition of anonymity. "This might go into the morning of the 26th".

Rajoelina is expected in the Seychelles on Monday and Ravalomanana a day later when talks between the two sides will start before the one-on-one on Wednesday.

Southern African nations which have not reacted to the announcement on Monday issued a fresh deadline of July 31 for the rival leaders to reach a deal.

The 15-nation Southern African Development Community (SADC) has threatened to exclude from future talks any party seen as undermining a deal on implementing political reforms.

In Antananarivo the communication ministry was not immediately available for comment and the foreign ministry in the Seychelles would not make any statement.

Officiel ou pas, en tout cas, ce secret de Polichinelle est en passe de devenir une réalité. Il a donc fallu attendre plus de trois ans à la Sadc pour enfin comprendre que les anciens présidents Ratsiraka et Zafy n’avaient rien à voir dans cette révolution orange de 2009. Quel gâchis, quelle perte de temps ! Mais cela signifie que les Malgaches ne sont pas encore prêts à être maîtres de leur propre destinée. Quelle aura été l’intérêt de ce temps perdu qui ne se rattrapera guère ? Mieux asservir économiquement un peuple qui n’aspirait à rien d’autre qu’à un changement drastique dans la gestion des affaires de la nation ? C’est fait, bravo ! Cette nation, formée par un peuple formaté pour rester pauvre d’esprit, n’aura plus d’autres alternatives que de s’endetter sur quatre générations, lorsque s’ouvrira le robinet des financements extérieurs qui n’ont rien de philanthropiques.

Au départ donc si cette rencontre n’a été officialisée par aucune entité… officielle, que dire de l’ordre du jour entre l’homme fort de la transition (transitional strongman) et du président exilé (exiled president) ? Toutefois, une seule et unique issue est reconnue unanimement par tous : seules des élections crédibles et acceptées de tous permettra de sortir de cette crise de politiciens, d’en finir avec la transition et de revenir à l’ordre constitutionnel. Voici donc ce que doit être l’accord politique passé entre Andry Rajoelina et Marc Ravalomanana pour le bien de la nation malgache et de son peuple éreinté d’avoir été tourné en bourrique depuis trois ans.

Cet accord politique, en toute logique, ne doit tenir qu’en un seule paragraphe. Andry Rajoelina et Marc Ravalomanana acceptent qu’aucun d’eux ne sera candidat à la future élection présidentielle. Du coup, on ne verra plus l’empressement du président exilé de revenir à Madagascar où il sait qu’il a des comptes à rendre à la justice. Aucun accord politique au monde ne doit servir de paravent à l’impunité totale et le temps n’effacera jamais les crimes commis. Or, ce retour et sa participation à la prochaine présidentielle seront les conditions posées par Ravalomanana. Logiquement, elles n’auront plus leur raison d’être puisqu’Andry Rajoelina ne se présentera pas. Ni les deux autres anciens présidents déchus, d’ailleurs.

Du côté de l’homme fort de la transition, ce retrait volontaire sera un signe de réel changement en matière de politique dans la Grande île. Il sera conforme à l’image de son idole, Nelson Mandela (qui ne s’est plus représenté pour un second mandat), et il sortira par la grande porte de l’Histoire. Du coup toutes les institutions de la transition se focaliseront sur l’organisation de toutes les élections à faire. Logiquement, cet accord politique entre les deux hommes amènera les bailleurs de fonds à financer ces élections dont la première, les législatives, est techniquement réalisable. Dire le contraire émane de la très mauvaise foi. En plus, ce sera un test pour rectifier les erreurs afin que la présidentielle soit un succès.

Comment construit-on une maison ? En commençant par les fondations. A Madagascar, en matière de politique depuis plus de 50 ans, on a toujours commencé par le toit, c’est-à-dire, l’élection du président. Mais que sont-ils TOUS devenus ? Ils ont tous été chassés par le peuple, en 1972, 1991, 2002 et 2009. Le plus intéressant serait même de commencer par l’élection des présidents de Fokontany (quartier), base fondamentale de la société malgache. Voilà pour la logique. Mais qu’en sera-t-il de la pratique ?

Au centre, Joachim Chissano, présent pour Dakar I et Dakar II en 2002, alors qu'il était président de Mozambique

CLIQUEZ ICI POUR UNE VIDEO EN MALGACHE EDIFIANTE SUR MONSIEUR RAVALOMANANA

Du côté de Marc Ravalomanana, il faudra se méfier, car même s’il accepte et signe, rappelons-nous les accords de Dakar I et II en 2002, dont Joachim Chissano est un témoin encore vivant : Ravalomanana a renié sa parole et sa signature qu’il a balayé d’un revers en criant : « Premier tour dia vita ! ». La vérité est qu’il n’a jamais été élu au premier tour mais le peuple en avait marre de l’Amiral Didier Ratsiraka et la Hcc a suivi le mouvement populaire, après que Ravalomanana ait procédé à deux prestations de serment à Mahamasina (février puis mais 2002). Par ailleurs, sa capacité de nuisance est toujours supportée par une fortune qui semble inépuisable. Il faudra craindre toute une kyrielle d’actes de déstabilisation, uniquement pour saboter le processus de sortie de crise. Car la parole d’un homme comme Ravalomanana ne sera jamais fiable.

Du côté d’Andry Rajoelina, il doit accepter que cette transition a trop duré que prévu et que ce n’est plus la peine d’insister à vouloir se présenter. Il sera alors le premier dirigeant malgache à donner l’exemple de ne pas s’accrocher au pouvoir, aussi transitoire qu’il soit. Il ne doit pas écouter la voix de son orgueil ni le chant des sirènes qui gravitent autour de lui et qui ne sont rien sans lui. Ils figurent déjà comme de nouveaux pauvres en puissance et souhaitons que le Bianco tienne parole pour traquer les enrichissements subits de certains, une fois l’ordre constitutionnel rétabli.

La non présentation de Rajoelina et Ravalomanana va bouleverser tous les calculs (politiques, évidemment) et nous verrons qui est patriote et qui ne l’est pas. Dès lors, qui sera candidat ? Ben, ils n’ont qu’à tous se présenter et nous leur souhaitons bon courage. Car être le premier président de la IVè république de Madagascar ne sera pas une sinécure après plus de trois ans de gabegie, d’incivisme et de corruption généralisés et à outrance. Ce ne sera pas la république du développement mais bien la république du retour au respect des lois. Là, avec cette liberté d’expression débridée, Monsieur le Président élu sera vite taxé de dictateur. Mais les lois devront être plus fortes que les hommes.

Cela dit, en toute logique, que se passera-t-il dans la réalité ? Tout le monde va se retourner contre tout le monde, en se traitant de traîtres. La composition du paysage politique va changer du jour au lendemain. Des alliances encore plus contre nature se feront, des secrets bien gardés seront jetés en pâture à l’opinion publique.

Pour l’heure, l’entourage d’Andry Rajoelina semble tout faire comme s’il allait se présenter. Plus pour garder les avantages liés à leur fonction qu’autre chose. Dans le camp de Ravalomanana, on fait courir le bruit qu’il va faire tout capoter si ses exigences, à lui, ne sont pas satisfaites. D’où le danger de ce tête-à-tête à huis clos, car personne ne saura vraiment ce qui a été convenu ou non. Et chaque camp va aller de désinformation en intox. En tout cas, il faut qu’un accord soit signé et respecté. Même si, en matière de sanctions effectives, le doute est toujours permis de la part de cette Sadc qui a le chic de mettre tous les Malgaches… dos à dos. Son bureau d'Antananarivo n'est même pas foutu de faire publier un communiqué sur cette rencontre aux Seychelles.

En écrivant cela et en le lisant, cela paraît simple, logique et salvateur sinon salutaire. Cependant, à Madagascar, les politiciens sont champions du monde toutes catégories de l’art de compliquer les choses, avec des arguments à ne pas sortir la nuit (où tous les chats sont gris). Et les « arbitres » ont une fâcheuse tendance à être… tendancieux. Car les vrais intérêts ne sont jamais ceux que l’on croit et pour qui l'on croit, dans une crise économique mondialisée par des escrocs américains. Quoi qu’il en soit si les deux ou l’un des deux se présentent, ce sera la catastrophe garantie. A bon entendeur salut !

Jeannot RAMAMBAZAFY – 22 juillet 2012

Mis à jour ( Dimanche, 22 Juillet 2012 12:41 )  
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