Palais d’État d'Iavoloha, le 07 septembre 2019. Dans le cadre de la visite du Pape François, et lors d'une rencontre avec les autorités malagasy, les membres du corps diplomatique et divers représentants de la société civile, en présence du souverain pontife, ayant également rang de chef de l’État du Vatican, le Président de Madagascar, Andry Rajoelina, a prononcé un discours à la hauteur de l'espérance des Malagasy et entrant dans le cadre de sa ferme volonté de développer réellement la Grande ile de l'océan Indien. Ce discours, le voici dans son intégralité. Pour la postérité.
Transcription de Jeannot Ramambazafy - Photos Harilala Randrianarison
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Votre Sainteté, Saint Père, Pape François,
Honorables invités,
Mesdames et Messieurs,
Vous tous ici présents.
Aujourd'hui est un jour béni ! En mon nom personnel et celui de mon épouse ainsi qu'en celui de tout le peuple malagasy, permettez-moi, votre Sainteté, de vous souhaiter la bienvenue à Madagascar mais aussi de vous adresser nos plus sincères remerciements pour l'honneur que vous nous faites en venant à Madagascar, bénir notre peuple et notre nation. C'est un honneur et un plaisir de vous revoir à nouveau, et de vous recevoir en visite d’État et Pastorale, ici, à Madagascar. Votre présence est une marque d'amitié et apparait comme une promesse tenue. La promesse que Madagascar n'est pas un pays oublié.
En effet, il y a 30 ans de cela, du 28 avril au 1er 1989, le Pape Jean Paul II a foulé le sol de notre Grande île. Son passage a marqué la vie et la foi des Malagasy. 30 ans après, vous voilà aujourd'hui chez nous. Tonga soa! La joie des Malagasy en votre venue est immense. Une joie qui nous unis pour être en communion avec votre foi et votre message de paix. Votre Sainteté,Vous êtes ici en terre amie, vous êtes ici chez vous. Mi casa es tu casa.
La visite du Pape Jean Paul II à Madagascar s'est faite presque 30 ans après le retour de l'indépendance de notre pays. Ce évènement a marqué la libération de Madagascar, une libération qui aurait du amorcer notre croissance. Et pourtant, 30 ans après, le développement tant attendu n'est toujours pas au rendez-vous. Les Malagasy, pendant 59 ans, ont sombré dans le désespoir, ont perdu leurs repères. Actuellement, en 2019, une nouvelle page s'ouvre dans l'Histoire de Madagascar.
Votre Sainteté, devant vous et cette assemblée, en ce lieu, en ce jour, je confirme ma volonté et mon engagement pour redresser et reconstruire Madagascar. Je veillerai sur les Malagasy. Je serai à l'écoute et aux côtés de mes concitoyen; je serai attentif aux plus faibles et aux plus démunis; je cultiverai la justice et l'équité, l'amour et l'espoir.
Je ressens et j'ai vu la souffrance de mes concitoyens, je les ai entendus et je les ai écoutés. Cela m'a fendu le coeur; cela a secoué mon âme. Et je leur ai promis que je ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour qu'ils croient à nouveau au destin de Madagascar; qu'il soient fiers de leur terre et de ce qu'ils sont. Je vais tout faire pour offrir un meilleur avenir aux Malagasy qui, depuis tant d'années, ont souffert de la pauverté, de l'injustice, de la partialité et de l'abandon.
Telle sera ma tâche, telle est ma mission. Et devant vous, Saint Père, avec humilité et déférence, je renouvelle ce serment. Je m’attèlerai, chaque jour à reconstruire Madagascar et à rendre leur dignité aux Malgaches . Je leur montrerai que les blessures peuvent être pansées et guéries, je leur montrerai que la haine nous divise et que l’unité nationale est possible, que l’amour est plus fort que tout, qu’avec la foi, la vraie, tout devient possible. Et c’est ensemble, tous les Malgaches unis, que nous serons vainqueurs.
“Raha mifankatia isika, dia hiova lanitra vao izao fiainana izao; koa ampanjakao ilay fitia, dia ho sambatra isika raha mifankatia”. Ce sont les paroles en Malagasy d'un cantique que j'affectionne particulièrement qui dit: Si nous nous aimons, alors un nouveau ciel s'ouvrira sur nous, sur nos vies; aussi, faites régner l'amour, alors nous serons heureux si nous partageons cet amour.
Cette nouvelle page que les Malagasy ouvrent, est un appel de détresse mais, surtout, un signe d'espoir. Les Malagasy ont repris leur destin en main.
Votre Sainteté, l'Histoire de Madagascar me rappelle la longue traversée vers la Terre promise qu'a vécu le peuple de Dieu. Notre chemin fut un vrai périple. Nous avons du affronter de nombreuses tempêtes, de terrifiants orages. Nous avons souvent soupiré, perdu espoir; nous avons failli perdre de vue notre direction mais jamais nous n'avons renoncé, jamais nous n'avons baissé les bras.
Majoritairement chrétiens, les Malagasy sont un peuple courageux qui garde entre ses mains la foi, l'espérance et l'amour: la foi ardente en Dieu; l'espérance en un meilleur lendemain et l'amour de la patrie. Madagascar est un grand pays, le plus grande île du continent africain. Elle est une terre bénie du Seigneur; elle est riche avec des ressources à foison et un potentiel inestimable.
Votre Sainteté, les valeurs que vous portez, l'idée morale que vous propagez, sont notre phare mais aussi notre boussole. Le peuple a soif de votre parole et votre visite parmi nous renforce notre espoir. Elle est porteuse d'espérance et de prospérité pour le pays et pour le peuple tout entier. Nous nous sentons gratifiés et heureux de pouvoir commencer cette nouvelle marche, que votre visite illumine.
Je sais à quel point il est déterminant et rassurant de commencer un nouveau chapitre avec la grâce du Seigneur et une bénédiction. Je me souviens comme si c'était hier, de ma visite au Vatican, il y a 6 ans de cela, le 26 avril 2013, en compagnie de mon épouse. Votre Sainteté, vous nous avez reçu. Et pendant notre entretien, je vous ai confié mon amour pour Madagascar, mon espoir pour ma patrie et mes concitoyens. Puis vous nous avez béni.
Ce fut un évènement mémorable, gravé dans mon cœur. Il fait partie de ces moments uniques dans lesquels j'ai puisé ma force tout au long de ces années passées jusqu'à ce jour, dans mes responsabilités de Chef d’État. Et, aujourd'hui, je suis heureux de ne pas être le seul à avoir ce privilège. Je suis heureux que mes concitoyens puissent, aujourd'hui, recevoir à leur tour cette bénédiction. Je suis certain que vos messages et votre bénédiction leur seront aussi précieux que pour moi. Ils seront réparateurs de tous les maux et inspirants pour le Futur de notre Nation et des générations à venir. Ils marqueront l'Histoire de Madagascar.
Votre Sainteté,
Pour finir, permettez-moi de reprendre une de vos citations: “l'amour est, au fond, l'unique lumière qui illumine, sans cesse, à nouveau, une monde dans l'obscurité'. Ces mots traduisent exactement le sentiment de tous les Malagasy en ce jour. Car par l'amour de Dieu, nous sommes tous rassemblés pour une grande communion.
Ainsi, je voudrais formuler pour tous: que les années à venir voient la foi des Malagasy se renforce et leur cœur s'ouvrir. Que notre peuple soit uni pour bâtir un meilleur avenir commun. Saint Père, nous vous demandons de garder Madagascar dans vos prières; nous vous demandons de prier pour le peuple Malagasy afin que nous puissions garder ce courage et cette résilience qui nous caractérise.
Que nous trouvions la force pour avancer, tous ensemble, car le peuple Malagasy mérite une vie meilleure, un pays en paix et un peuple uni.
Que Dieu bénisse Madagascar,
Loué soit le Seigneur.
Andry Rajoelina
Président de la République de Madagascar