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Drépanocytose. Une maladie très mal connue à Madagascar

Drépanocytose: maladie de sang héréditaire

Lors du Conseil des ministres du 18 décembre 2019, au Palais d’État sis à Iavoloha, une communication a révélé que, dorénavant, le ministère des Finances et celui de la Santé publique ont donné l'autorisation à l'Ong LCDM (Lutte Contre la Drépanocytose à Madagascar) dirigée par Pascale Jeannot -qui travaille en partenariat avec la Faculté de Paris Saclay- et au programme SOLIMAD pour qu'ils puissent faire en sorte qu'il n'y ait plus aucune taxe (“haba”) ni impôt (“hetra”) d'aucune sorte à payer pour l'importation de matériels médicaux et éducatifs destinés à soigner la drépanocytose. Depuis tout ce temps, c'est déjà mieux que rien. Encore faut-il bien connaître cette maladie du sang que certains journalistes malagasy tendent à confondre avec une maladie du système nerveux comme le “lefak'hozatra” qui n'est rien d'autre que la poliomyélite. Rien à voir avec la drépanocytose.

Jeannot Ramambazafy et Rossy, dans une clinique privée d'Antananarivo où celui-ci s'est soigné, en novembre 2018, d'une énième crise de drépanocytose

Il faut savoir aussi que le drépanocytaire le plus célèbre à Madagascar est le député Paul Bert Rahasimanana, alias l'auteur-compositeur-interprète Rossy qui a salué l'initiative gouvernementale, mais qui a également tenu à remercier le couple présidentiel malagasy. Voici ce que Rossy a écrit sur sa page Facebook, à la suite de cette communication lue en Conseil des ministres: “Les drépanocytaires de Madagascar remercie le Chef de l’État et Mme Rajoelina pour leur attention et leur écoute quant aux activités de l'association contre la drépanocytose mais aussi le couple Pascale Tuseo-Jeannot et toute l équipe pour ce projet. Merci mille fois”.

Qu'est-ce que la drépanocytose ?

La drépanocytose (également appelée anémie falciforme, hémoglobinose S et autrefois sicklémie) est une maladie génétique héréditaire caractérisée par une anomalie de l'hémoglobine, composant essentiel des globules rouges, permettant le transport de l'oxygène dans le sang. La drépanocytose est également appelée "anémie à hématies falciformes". Les globules rouges sont déformés et prennent une forme de faucille. Ils ont, alors, des difficultés à circuler et peuvent occasionner des caillots dans les vaisseaux, à l'origine de nombreuses complications et douleurs. Cette maladie est apparue en Afrique et en Inde. Elle a été décrite pour la première fois dans la littérature médicale en 1910 par le médecin James Herrick et sa transmission héréditaire a été établie en 1949 par James Neel. C'est la maladie génétique la plus fréquente dans le monde, existant également en Italie du sud, en Grèce, dans le Proche-Orient, aux Antilles et au Brésil.

Causes de la drépanocytose

Cette maladie génétique est causée par une mutation du gène codant pour la synthèse de l'hémoglobine. La drépanocytose correspond à une anomalie autosomique récessive, c'est-à-dire qu'elle touche aussi bien les filles que les garçons, et elle ne se manifeste que si le patient est porteur de deux gènes de la maladie. Pour que la maladie se transmette, les parents doivent donc être tous deux porteurs du gène muté.


Les formes de la drépanocytose

Il existe deux formes de drépanocytose :

1. La drépanocytose hétérozygote. Une personne atteinte de drépanocytose hétérozygote est porteuse de la maladie sur un seul gène, ce qui signifie que la maladie ne s'exprime pas. Elle correspond à la forme AS, avec un gène normal A et un gène anormal AS. En revanche, elle peut donner naissance à un enfant drépanocytaire, si l'autre parent est également porteur du gène.

2. La Drépanocytose homozygote ou forme SS. Cela signifie que les deux gênes sont mutés, le gêne normal étant nommé A et le gène muté nommé S. Cette atteinte se manifeste avant l'âge de 2 ans par un ictère (jaunisse), un teint pâle et des douleurs abdominales. C'est la forme de drépanocytose la plus grave.

Dépistage de la drépanocytose

La maladie est suspectée face à une anémie chronique objectivée sur les prises de sang et confirmée par une électrophorèse de l'hémoglobine. Il s'agit d'un examen permettant de mettre en évidence un fort taux de l'hémoglobine S, en cause dans la maladie. Il n'existe pas de traitement curatif de la drépanocytose.

Les symptômes de la drépanocytose

Les symptômes de cette maladie génétique évoluent par poussées douloureuses, au niveau des extrémités des membres ou abdominales, appelées crises vaso-occlusives, dues à l'obstruction vasculaires par les globules rouges. Les membres atteints peuvent devenir rouges et gonflés. On peut observer des infarctus osseux, très douloureux. La rate étant atteinte, les sujets drépanocytaires sont également plus sensibles aux infections, qui peuvent être sévères. Chez les enfants, elle se traduit par une anémie ainsi qu'une fatigabilité et un ictère.

Les traitements de la drépanocytose

Il n'existe pas de traitement curatif de la drépanocytose. La prise en charge consiste à soulager les douleurs en période de crise, prévenir le risque d'infections graves et prendre en charge les complications.

* Les antalgiques sont adaptés à l'intensité des douleurs et on peut aller du paracétamol à des dérivés morphiniques.

* Les antibiotiques sont administrés en cas d'infection.

* Parfois des anticoagulants ou des vasodilatateurs peuvent être nécessaires.

* Une hydratation suffisante est indispensable au quotidien. Un complément par acide folique est proposé, ainsi que par chélateur du fer, en cas de transfusions fréquentes.

* Les transfusions sanguines sont proposées lorsque le taux d'hémoglobine est inférieur à 7 g/dl.

* La greffe de moelle osseuse est réservée aux formes très sévères de drépanocytoses.

Actuellement, le développement des thérapies géniques permet d'avoir un espoir dans le traitement de cette maladie. Dans son ensemble, la thérapie génique est une alternative pour les malades qui ne peuvent pas bénéficier d'une greffe de moelle osseuse faute de donneur compatible dans la fratrie. Mais c'est extrêmement coûteux... Pour vous donner une idée, et pour lutter contre les maladies du sang prises globalement, il y a le Zolgensma à 2 millions d'euros l'injection unique. Il a permis de sauver Pia, en octobre 2019 en Belgique. C'est le médicament le plus cher au monde et les parents de Pia, 9 mois, avaient lancé une collecte de fonds par SMS dans toute la Belgique.

Il y a encore le Kymriah à 350.000 euros contre la leucémie aigüe lymphoblastique. Juste pour vous donner une idée de l’inaccessibilité de ce genre de médicament pour la majorité des malades...

Pour en revenir à la drépanocytose, voici deux exemples de guérison assez récents qui donnera l'espérance (et non plus le simple espoir) à Rossy et tous les drépanocytaires de Madagascar.

Premier cas. Le 2 mars 2017, des chercheurs de l'hôpital Necker-Enfants malades et de l'Institut Imagine à Paris ont annoncé qu'une thérapie génique a permis de traiter avec succès un garçon, âgé de 13 ans, atteint de drépanocytose. Depuis, selon le Pr Marina Cavazzana, qui a dirigé ces travaux : “ Il va bien, il n'a plus besoin de transfusion mensuelle, de médicaments anti-douleurs, ni d'hospitalisation”.


Second cas. Le 19 juin 2018, lors de la célébration de la journée mondiale de la drépanocytose, il a été annoncé, au Canada, qu'une jeune femme originaire d'Edmonton venait d'être guérie de la drépanocytose, grâce à une transplantation de cellules souches. La procédure n'avait jamais été opérée sur un adulte auparavant dans ce pays. La transplantation de cellules souches a eu lieu au centre de cancérologie Tom Baker de Calgary.

En matière de chiffres, sachez que si, à travers le monde, 120 millions de personnes sont touchées par la drépanocytose, quelle que soit la forme, et environ 310.000 enfants naissent chaque année avec cette maladie reconnue par l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS). comme étant un des 4 fléaux, au même titre que le paludisme, le sida et la tuberculose. 114.000 personnes sont mortes de drépanocytose en 2015 (Source Wikipédia).

Pour rester à Madagascar où une personne sur dix est atteinte de drépanocytose, et près d'une sur cinq dans le sud-est et l'est de l'île, faites connaissance avec Pascale Jeannot.


Pascale Jeannot, co-fondatrice de l'Ong LCDM

Fille d’un drépanocytaire, d’origine malgache, elle a vécu avec la drépanocytose toute son enfance sans avoir mis un nom sur la maladie, mais consciente de la souffrance et de la douleur qu’elle occasionnait. Après que l’on ait diagnostiqué la maladie chez sa fille, à l’âge de 2 ans, elle a décidé de se battre pour que des familles, des mères, des malades n’aient plus à vivre l’enfer de l’ignorance. En 2005, avec deux amies, les Doctoresses Zanamiarana Andriambao Damasy et Johanita Ndahimananjara, elle met en place l'association LCDM -devenue Ong qu'elle préside-, première association de lutte contre la drépanocytose à Madagascar. Actuellement, la Fondation Sanofi Espoir est partenaire de LCDM, à travers un programme de Prévention, d'Information, d’Éducation sur la prise en charge au quotidien de la drépanocytose à Madagascar, avec trois objectifs principaux :

1. Faciliter l’accès des populations exposées à un diagnostique et un traitement sur la drépanocytose efficace.

2. Continuer et pérenniser un travail de terrain efficace et élaboré, d’Éducation, d’Information, de Prévention sur la drépanocytose. Changement de comportement.

3. Dépister, et aider à dépister les personnes à risques dans les zones et districts sensibilisés, en collaboration avec les autorités locales et des Institutions.


Bruxelles, 4 novembre 2016

En 2011, LCDM a permis la prise en charge de 4.567 malades et leur famille tous les mois et la formation de 1.087 médecins et agents communautaires. Ceci expliquant cela, le 4 novembre 2016, Pascale Jeannot, présidente fondatrice de s’est vue remettre, dans les salons du Sénat du palais du Luxembourg, le prix “Femmes3000” (Femmes du troisième millénaire) 2016. Décerné tous les deux ans, ce prix veut mettre en valeur l’action de femmes remarquables et soutenir les projets qu’elles portent.

Pour boucler la boucle, il n'est pas inutile de rappeler que Pascale Jeannot et son Ong LCDM sont à l’origine du Programme National de Lutte contre la Drépanocytose du ministère de la Santé publique malagasy. 11 ans après donc, leur engagement a enfin bénéficié de cette exonération de taxes et autres impôts citée en début d'article. Bravo à cette Dame qui portent deux de mes prénoms ! Eh oui, amis lecteurs, je me prénomme Jeannot Pascal Elysée. Et bien que n'étant pas drépanocytaire, je roule à fond dans cette lutte de longue haleine à Madagascar, il faut bien en convenir. Mais un grand pas vient d'être franchi au Palais d’État d'Iavoloha, le 18 décembre 2019. Nous en attendons tous les retombées...

Jeannot Ramambazafy - Également publié dans "La Gazette de la Grande île" du 24 décembre 2019

 

Mis à jour ( Vendredi, 27 Décembre 2019 09:24 )  
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