Décidément, les Malgaches ont hérité d’un président pas du tout comme les autres. Hérité car, en fait, il n’était pas fait pour être un dirigeant d’une nation. Brillant ministre des Finances et du Budget, certes, mais piètre président, dès le départ à Mahamasina, le 25 janvier 2014 : stade à moitié plein et plagiat dans son discours. Et les gaffes se sont accumulées en deux mois à la tête du pays. Mais ce 29 mars 2014, au Cercle messe militaire de Soanierana (Cemes) constitue une insulte à tous les combattants éprise de liberté, et à l’Histoire politique même de Madagascar.
Etait-ce "l'anniversaire" de l'accès au pouvoir de ces créatures-là ?
Qu’est-ce que le 29 mars 1947 pour Madagascar ? Une date à ne jamais oublier et à rappeler aux générations présentes et à venir comme un ayant été un moment sombre qui a fait 89.000 victimes. Mes arrière-grands-parents, nos aïeux. Tous les ans donc, c’est un moment de recueillement pour le repos de l’âme des victimes de la colonisation française et une marque de respect envers les survivants dont le nombre diminue au fil des ans.
Mon Dieu ! Pauvres 89.000 martyres malgaches dont la mémoire a été souillée. Et personne n'a trouvé à redire. Personne. Pourquoi ? Comment voulez-vous qu'il ne verse lentement vers le diktat si personne n'ose le critiquer objectivement ? Il fallait écrire "commémoration" ("fanamarihana" ou "fahatsiarovana").
Mais les photos illustrant cet article sont tout simplement épouvantables. Or, on dirait que personne ne l’a remarqué et les journalistes présents -car il y en a eu- ont trouvé cela « normal » (dans les normes). Faire de la 67è commémoration du 29 mars 1947 un « anniversaire » n’est pas seulement un manque total de maîtrise de la langue française mais un mépris aux morts et aux vivants. Car, pourquoi cette phrase écrite en français sur le « gâteau d’anniversaire ». Alors que c’était le colonisateur français le bourreau ? Et cela n’a aucun rapport avec le « nofo-kena mitam-pihavanana » (littéralement : le morceau de viande qui sert de lien à l’amitié, la fraternité, le « Fihavanana » étant une notion d’union et d’unité large, allant du lien de parenté aux simples relations entre Malgaches).
Champagne ! Et le Premier ministre du gouvernement de Transition, Omer Beriziky, applaudit... C'était vraiment le festin des mendiants et des orgueilleux. Alors que sur l'ensemble du territoire malgache, la vente de boissons alcoolisées est interdite dès le 28 mars au soir.
Par ailleurs, par définition, un anniversaire est la date dans l'année à laquelle un événement heureux ("Fankalazana") est survenu, habituellement une naissance. Et que s’est-il passé ce 29 mars 2014 au Cercle messe militaire de Soanierana (Cemes) ? Non seulement il y a eu un gâteau « d’anniversaire » mais en prime, le nouveau président de la république de Madagascar a sablé (et non sabré) le champagne, mais il a aussi poussé la chansonnette comme dans un vulgaire « karaoke » (EXTRAITS ICI). Certes, c’était une composition de l’auteur-compositeur Bessa (Rabe Samuel), mais tout de même ! Et il a été applaudi en prime pour le passage vraiment anti…révolutionnaire. Il a même dansé.
Non seulement il a poussé la chansonnette mais il a dansé, selon les commentaires en malgache au début de la vidéo
La question qui se pose, à présent est : comment vont-« ils » m’attaquer ? Parce que le rêve de certains d’entre eux -les murs ont des oreilles- et de m’empêcher de révéler des vérités trop lourdes à supporter pour ces créatures venues de nulle part, dans l’Histoire des luttes populaires malgaches. Mais c’est sûrement pour çà , justement, qu’ils font n’importe quoi, au nom du pouvoir absolu qu’ils inculquent à un président d’origine plutôt modeste sinon d’un caractère effacé. Ce que je leur suggère, en tant que citoyen ayant voté pour le candidat n°3, c’est de cesser de rêver et d’œuvrer réellement pour l’intérêt du grand nombre en arrêtant de faire du nombrilisme dangereux pour eux-mêmes. Tout a une fin ici-bas. Chacun choisit la sienne : sortie par la grande porte comme un héros ou par la lucarne comme un voleur. A bon entendeur, salut !
Le reportage photo complet de cet "anniversaire" sur sobika.mg
INFO DERNIERE
Ses descendants viennent de m'apprendre la nouvelle: Rasoanaly Noeline, combattante du MDRM en 1947, est décédée dans l'après-midi de ce 31 mars 2014. Elle avait 93 ans. Ceux qui ont célébré un "anniversaire" la connaissaient-ils ? Non. Et c'est une partie de la mémoire collective malgache qui s'efface, avec le départ de Madame Noeline. Je présente personnellement mes condoléances à l'illustre disparue, hélas méconnue sinon inconnue.
Jeannot Ramambazafy – 31 mars 2014