Serait-ce aussi la société Benchmark Advantage Fund qui a payé, rubis sur ongle, les 3,2 milliards d'anciens francs malgaches, coût total de ce déplacement d'une délégation présidentielle de 36 personnes ? Il ne faut plus s'étonner de rien ici-bas, mais la contrepartie n'avantagera jamais le peuple malgache...
Jakarta, 21 avril 2015. En marge du Sommet Afrique-Asie marquant les 60 ans de la Conférence de Bandung, le CEDS (Centre d’études diplomatiques et stratégiques) de Madagascar n’a pas usurpé son appellation. En effet, partis en éclaireurs en Indonésie, les membres de sa 11ème promotion, dirigés par Solofo Rasoarahona, ont concocté un évènement qui ne règlera pas les problèmes dans lesquels pataugent le peuple malgache depuis l’accession au pouvoir du candidat par substitution, Hery Rajaonarimampianina, mais lui permettra à lui, son épouse et sa nombreuse délégation officielle de raconter une belle escale indonésienne à leur postérité.
« Madagascar Night » (« Takarivan’i Madagasikara »). Tel a été l’intitulé de la soirée plus culturelle qu’autre chose, aux antipodes des réalités malgaches. Et le thème est encore plus sidérant : « Tantara lava be no efa niombonana tamin’ny andro lasana ary pejy maromaro no ho soratana miaraka amin’ny andro ho avy ». Traduction littérale : Nous avons eu une très longue histoire commune par le passé, et ce sont de nombreuses pages de cette histoire que nous allons écrire ensemble pour les jours à venir.
Les images cartes postales c’est formidables mais une fois sur place, en terre malgache donc, touristes et investisseurs déchanteront en moins de trois jours. Mais pour ce régime, rien n’est jamais trop beau pour prendre les Malgaches pour des cons finis. Je me demandais la raison de la présence du ministre « Elmer » Joeli Valérien Lalaharisaina, prévu pour rencontrer à Madagascar Mme Clare Short, présidente d’EITI.
Ben, en fait, la société Benchmark Advantage Fund -actionnaire à 40% de Madagascar Oil- vient juste d’obtenir le permis d’exploiter le pétrole conventionnel à Tsimiroro. Et, naturellement, Benchmark est la seconde cheville ouvrière, avec le CEDS, de cette soirée dédiée à Madagascar à Jakarta. Cela, en remerciement surtout, au « Filoha » d’avoir gardé, dans une loi, le fabuleux 1,4% qu’elle paiera sans rechigner à l’Etat malgache, en guise de redevances. Pour 25 ans.
Et bientôt, toujours, grâce au CEDS, pour Hery Rajaonarimampianina, un autre titre de docteur honoris causa de l'"Universitas Trisakti" qui travaille en étroite collaboration avec l'école polytechnique de Vontovorona ?
Le Dr Emil Salim
Dans tout ce bling bling au détriment de la misère de tout un peuple, et connaissant les ravages causés par l’exploitation, un homme est resté réaliste. Il s’agit du Dr Emil Salim, spécialiste de l’environnement et de l’énergie. Dans son intervention, il a rappelé ceci : « Si vous voulez que Madagascar soit un levier du développement durable, en regard de l’exploitation pétrolière, il importe que ses dirigeants soient très à cheval sur le respect et la conservation de leur environnement ». En pratique, et malgré les applaudissements, c’est comme s’il s’était adressé à un mur (des lamentations). Car malgré les « réformes » et les lois dans ce domaine, rien n’est appliqué, rien n’est respecté. Ce ne sont pas les preuves qui manquent pour confirmer cela.
Mais comme diplomatie est synonyme d'hypocrisie, place à la danse traditionnelle ! Je ne sais pas vous, compatriotes mais si je suis fier d’être Malgache, j’ai de plus en plus honte des actuels dirigeants qui passent leur temps à embellir une Grande île totalement à la dérive. En tout cas, quoi qu’il puisse arriver, chapeau au CEDS pour ce coup de maître, même si le nerf de la guerre provient de Benchmark. Et il est de renom mondial que l’argent constitue la grande faiblesse (dans tous les sens du terme) de ce régime Rajaonarimampianina.
Sur cette photo, vous reconnaîtrez facilement le couple Hery et Voahangy Rajaonarimampianina; Solofo Rasoarahona, en chemise très couleur locale (au centre sous le carton Very very important person); Joeli Valérien Lalaharisaina derrière Henry Rabary-Njaka (à l'extrême-droite)
Cet intermède, à des milliers de kilomètres de Madagascar, peut-il être considéré comme une sorte d’accalmie avant une énorme tempête socio-politique qui risque de tout balayer, eux avec ? Seul Dieu les sait. Mais l’homme, lui, sait que l’Histoire est un éternel recommencement et que les mêmes causes produiront toujours les mêmes effets.
Aussi, amusez-vous bien et rira bien qui rira le dernier.
Jeannot Ramambazafy – 22 avril 2015