« Dura lex Sed lex » (la loi est dure mais c’est la loi). Mais dans le cas de l’affaire Danil Radjan (ICI), pour qui est-elle dure ?
Le 3 juin 2021, devant la cour criminelle ordinaire du tribunal d’Antananarivo, après un procès qui a bien duré cinq bons tours d’horloge, les quatre inculpés dans l’assassinat de Danil Radjan -Lionel Lelièvre et trois de ses employés de la société de sécurité civile COPS- ont été relaxés au bénéfice du doute. Cela, pour insuffisance de preuve permettant de justifier les charges ayant pesé sur eux.
A l’époque, pourtant, les quatre accusés, au lieu d’aller trouver leur famille respective, ont été ramenés au bagne de Tsiafahy car le ministre du moment, Johnny Richard Andriamahefarivo avait intimé au parquet de se pourvoir en cassation. Or, l’État n’est nullement partie civile dans cette affaire… En tout cas, le verdict du 3 juin 2021 a bel et bien été cassé.
Et le temps a passé et deux ministres de la Justice ont succédé au ministre Johnny pas good du tout : d’abord Imbiki Anaclet (nommé au cours du remaniement gouvernemental du 15 août 2021), soudainement embarqué dans une sale histoire valant deux milliards… Assez étrange pour une personnalité qui entendait effectuer un grand balayage au sein des Sceaux (des sots ?) dont il avait la garde. Entre-temps, Lelièvre and Co sont restés en prison où ils se trouvaient depuis septembre 2020.
Puis, vint le 5ème remaniement gouvernemental sous le Premier ministre Christian Ntsay, le 16 mars 2021 avec l’arrivée de Rakotozafy François à la tête du ministère de la Justice de Madagascar. Soudain, sans crier gare, le 21 mars 2022, les 4 inculpés de l’affaire Danil Radjan ont comparu, à nouveau, devant la cour criminelle ordinaire du tribunal d’Antananarivo qui a émis le même verdict que celui du 3 juin 2021. A savoir : relaxation au bénéfice du doute pour les quatre accusés, pour insuffisance de preuve permettant de justifier les charges ayant pesé sur eux.
A l’issue de ce second procès au même verdict que le premier, et dans la salle d’audience même, des individus armés sont venus dans le but d’emmener avec eux Lionel Lelièvre, arguant qu’ils avaient un mandat d’arrêt international. Information relevée lors de l'interview de l'avocat des relaxés. La démarche, avortée, de ces personnages armés, était-elle légale ? Ce n’est pas sûr. En effet, relaxé purement et simplement ou au bénéfice du doute, tout accusé ou inculpé (c’est une question de vocabulaire), doit d’abord retourner en prison y attendre sa levée d’écrou. Sinon, leur non-retour à Tsiafahy s'assimilerait à une invasion pure et simple. Etait-ce -tout est possible ici-bas- une tentative de kidnapping de Lionel Lelièvre ? Quoi qu'il en soit, il importe de savoir qu’au moment du premier procès, une « note rouge » aurait été émise par Interpol (Organisation internationale de police criminelle) à l’encontre du Français. Le conditionnel est de rigueur ici.Qu’est-ce ?
Selon wikipedia, une notice rouge (parfois encore abusivement appelée « mandat d'arrêt international ») est un message d'alerte international diffusé par Interpol, utilisé par les services de police pour communiquer à leurs homologues du monde entier sur des infractions, des malfaiteurs et des menaces. Interpol la diffuse à tous ses pays membres à la demande d'un pays membre ou d'une entité internationale autorisée.
Cependant, pour qu'une notice rouge soit délivrée et diffusée par Interpol des règles précises doivent être respectées scrupuleusement. En effet, le Bureau central national (BCN) doit fournir au secrétariat général d'Interpol une série d'informations, notamment sur les éléments qui concernent le mandat d'arrêt en cours de validité dans le pays concerné. Par ailleurs, les pays membres qui sollicitent Interpol pour obtenir une notice rouge doivent formuler une demande conforme à la réglementation de l’Organisation qui précise notamment dans l'article 3 de son statut que « toute activité ou intervention dans des questions ou affaires présentant un caractère politique, militaire, religieux ou racial est rigoureusement interdite à l’Organisation ».
Rakotozafy François, Ministre de la Justice de Madagascar
Alors, qui sont ces personnages armés qui ont fait interruption dans la salle d’audience, lors du procès du 21 mars 2022 ? Attendons que le ministre Rakotozafy François éclaire notre lanterne…
Jeannot Ramambazafy